Alors qu’une nouvelle extension pointe le bout de son nez, reparlons un peu de Crusader Kings II avant de la tester. Cette fois il va s’agir d’un récit de partie avec un pays assez rarement évoqué dans les jeux vidéo : l’Écosse.

Si le jeu ne lui est pas spécifiquement consacré, il est possible de l’incarner et je trouve le défi intéressant. J’ai choisi le scénario débutant en 867, notamment car l’Angleterre n’est pas encore unifiée, et devrait me poser moins de problème. Voyons donc au cours de ce récit ce qu’il est possible d’accomplir lors d’un long règne avec un état moyennement puissant.

Tout d’abord, quelle est la situation stratégique de mon état au début de cette année 867 ? Nous sommes en plein haut Moyen-Age, et les frontières sont bien plus imprécises et fluctuantes que lors d’époques postérieures. Les grands seigneurs se font la guerre, les cartes sont peu détaillées et les conflits en tout genre nombreux.

Là, les îles britanniques sont très divisées : l’Irlande se perd dans des affrontements entre de multiples roitelets, l’Angleterre et le Pays de Galles ne sont pas encore unifiés, et moi-même, si je règne sur un royaume d’Écosse… Celui-ci est encore restreint. Le sud est aux mains des rois de Strathclyde et de Northumbrie, alors que les îles Hébrides, Orcades et l’Argyll appartiennent à des Scandinaves venus s’y installer.

Ces Vikings ou « hommes du nord » (ce qui a donné le mot « Normand ») sont alors en pleine expansion et vont, dans les siècles à venir, s’installer en France, Angleterre, Sicile et ailleurs. Il n’est pas impossible qu’ils viennent me chercher des noises. Tout en gardant un œil sur leurs agissements et ceux des autres royaumes de Grande-Bretagne, mon premier but sera donc d’assainir ma base financière et de régler les problèmes internes.

Ceci fait, je pourrai conquérir leurs petites possessions éparses, pour unifier l’Écosse sous ma bannière. Pour le moment, je choisis de faire de mon roi un bon intendant. Il ne règne en propre que sur une unique possession et n’a que peu de revenus. Le reste appartient à mes vassaux et les amener à m’obéir ne va pas être une partie de plaisir.

Avant de songer à quoique ce soit d’extérieur, il me faut donc régler certains problèmes internes. Tout d’abord, mon roi se trouve sans épouse, impensable si je veux perpétuer la dynastie et espère continuer jouer avec ses descendants.

J’organise donc un mariage intéressant avec une princesse franque, ce qui me permet par la même occasion de bénéficier d’un traité de non-agression avec son père, tant que dure le mariage. La promise est d’une belle lignée et j’en retire 112 points de prestige. Rappelons que celui-ci s’ajoute au score du joueur à la mort du roi et peut être dépensé pour certaines actions, constructions. Ce n’est donc pas négligeable et gare aux mésalliances !

Dans le même temps, j’entame un très long travail de centralisation du pouvoir. Il va me permettre, peu à peu, de limiter la puissance de mes vassaux et d’affirmer la mienne. A terme, il sera possible d’installer le système féodal du Moyen-Age central où la figure du roi devient centrale.

On songe au long combat mené en ce sens par les Capétiens depuis l’arrivée au pouvoir d’Hugues Capet en 987 par exemple. En quelques siècles ils agrandirent considérablement le domaine royal et leur pouvoir, même si les grands seigneurs se révoltèrent encore au début du règne de Louis XIV, c’est la Fronde. On mesure bien la lenteur de l’affirmation du roi et, par conséquent, de l’état !!

Ainsi, là, je ne suis encore qu’un chef de tribu un peu plus puissant que les autres.  On le voit, ces décisions doivent être approuvées par les membres de mon conseil qui, à ce stade du jeu, sont encore très puissants. Je ne compte que pour une voix. Heureusement, on peut les fléchir en leur offrant certains postes et faveurs. Avec le temps, il est aussi possible de réduire leurs prérogatives.

En tout cas, on constate que les dernières extensions ont apporté une vraie profondeur au jeu, même s’il manque encore certains raccourcis pour retrouver rapidement les personnages opposés à ses décisions.

Enfin, investissant mes maigres moyens dans la construction de bâtiments, je décide d’agrandir ma ville principale, ce qui devrait augmenter mes revenus. Je gagne, pour le moment, moins d’une pièce d’or par mois, hors évènements et pillages. Inutile de dire qu’il faut donc faire attention à ses décisions qui peuvent coûter cher.

On le voit sur la capture d’écran ci-dessous, certains bâtiments, ce que j’évoquais plus haut, coûtent du prestige et non pas de l’argent. Ces premières décisions prises, je laisse passer quelques mois, avant de me sentir prêt à défier un voisin.

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L’Écosse en 867. Elle est encore bien petite, mais moi roi a de très bonnes capacités et son règne s’annonce prometteur.
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J’organise un mariage avec une puissante princesse franque. Ceux-ci sont importants pour les héritiers et nouer des liens avec les autres personnages. Vérifiez donc à qui vous mariez vos enfants !
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Peu à peu mon royaume verra le pouvoir être concentré dans les mains du roi, pour empêcher que les vassaux ne me nuisent.
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Mon petit pécule de départ va me permettre quelques premières constructions, pour renforcer mes revenus. L’armée viendra ensuite, l’argent est le nerf de la guerre.

Il est donc temps de s’occuper d’un premier importun : le roi Ivar le Désossé me nargue, s’accrochant à la côte ouest et aux Hébrides ! Estimant que ses terres doivent me revenir, car faisant partie de l’Écosse, je lui déclare la guerre.

Ce casus belli me semble plus judicieux que la guerre sainte (il n’est pas de la même religion que moi), car celle-ci pourrait attirer à ses côtés ses coreligionnaires et je me retrouverais entouré d’ennemis. Vous remarquerez qu’en ces temps il est nécessaire que le conseil approuve les projets de guerre. Celui-ci est si important qu’il serait malvenu de le mécontenter, sous peine d’être bloqué dans tous ses choix.

Ainsi, le 4 mars 868, les troupes royales sont convoquées pour la guerre. Les vassaux ont répondu présent à mon appel et vont rameuter leurs propres soldats à mes côtés. Impossible d’espérer me battre sans leur aide, mes effectifs étant trop squelettiques en début de partie : environ 700 hommes ici. Là, leur soutien s’avère décisif et me permet d’avoir à peu près la parité numérique avec l’ennemi, et de remporter une importante victoire en novembre 868, alors que les places adverses se rendent peu à peu.

Quelques jours plus tard, fort de mes succès, je propose la paix à Ivar, qui n’a d’autre choix que de l’accepter. Moins d’un an après le début de la partie, je ramène donc la chefferie d’Argyll dans le giron de l’Écosse.

C’est un début encourageant, mais toutes ces provinces restent assez pauvres et peu peuplées. Rien à voir avec les fertiles plaines de Flandre et le nord de l’Italie !

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Dès 868 j’envisage de conquérir une première province. Le conseil est d’accord, et dans le cas contraire rien n’aurait pu être envisagé.
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Les troupes royales sont à pied d’oeuvre, celles des vassaux vont suivre. Nous parlons du Moyen-Age, il faut donc un certain temps pour rassembler les hommes et les garder sous les armes trop longtemps déplaît aux vassaux concernés.
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J’emporte une grande victoire contre un ennemi aux effectifs semblables aux miens. Quel soulagement.

Le sud de l’Ecosse, les Southern Uplands et les basses terres (Lowlands) ne m’appartiennent pas encore, mais des membres de ma famille y règnent. C’est le cas en Strathclyde, dont le roi me propose une opportune alliance.

Celle-ci me convient car elle vient sécuriser une partie de mon flanc sud, et me laisse espérer de bons développements pour l’avenir, alors que la Northumbrie semble avoir éclaté en deux. Comme le dit le célèbre adage, il faut « diviser pour mieux régner » et tout ceci me laisse les mains libres pour continuer à grignoter les possessions scandinaves qui restent à mes frontières. Je (ou plutôt mon roi) me frotte les mains.

Deux options s’offrent à moi : terminer le travail vers l’ouest en conquérant les Hébrides, ou m’étendre vers le nord en réalisant l’annexion des Orcades, dont le chef est un tout jeune homme qui semble abandonné par ses frères nordiques. En septembre 879, soit après quelques années passées à développer mon économie et mon armée, j’opte pour le premier choix et mes émissaires, bannerets et hérauts parcourent les hautes-terres (Highlands).

Leur but ? Appeler les guerriers écossais au combat ! Il va s’agir de rejeter les Vikings à la mer et les chasser de mon flanc ouest. Affaiblis par d’autres guerres, ils ne peuvent m’opposer qu’un millier de guerriers, alors que j’aligne des troupes plus de deux fois supérieures. L’issue paraît certaine.

Bien entendu, le terrain est difficile et l’ennemi dispose de plusieurs places fortes qu’il faut réduire par des sièges en règle, en attendant de longs mois que les garnisons affaiblies par la faim et la soif se rendent. Donner l’assaut est coûteux et finalement assez rare au Moyen-Age, comme le rappelle Philippe Contamine dans son livre magistral sur la guerre durant cette période.

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Cette guerre est la première d’une longue série de conflits victorieux, du moins je l’espère !

Reste qu’à la fin du mois d’avril 880, c’est chose faite : je me suis emparé des Hébrides. Peu à peu mon royaume s’agrandit, certes encore de terres frustes, mais habitées par de farouches guerriers qui vont venir renforcer mon ost royal.

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L’un de mes voisins du sud me propose une alliance, il est de ma famille. J’accepte bien évidemment, pour avoir les mains libres dans cette direction.
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Les Orcades semblent une belle proie. Vais-je m’en emparer maintenant ?
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Nous verrons plus tard, je préfère terminer de conquérir les Hébrides.

Là intervient une série d’évènements que nous propose le jeu depuis quelques extensions, et au demeurant fort sympathique. C’est-à-dire que votre souverain pourra partir en voyage, pèlerinage etc. Avec parfois des conséquences très importantes sur votre partie, par exemple s’il lui arrive malheur.

Dans le cas présent, l’un de mes plus proches conseillers me propose de cingler jusqu’en Bretagne pour tenter d’y établir des relations commerciales durables. L’idée est intéressante et je choisis de tenter sincèrement l’aventure.

Tout abord j’achète un bon navire pour m’y rendre, emmène dans ma suite de marchands et prêtres pour m’assister, sous peine de les mécontenter… Et prend la mer. L’été 880 bat son plein et l’avenir semble regorger de promesses. Quelques mois plus tard, me voilà bien arrivé en Bretagne et les négociations avec les pouvoirs locaux commencent.

C’est dans ce genre d’évènements que le caractère de votre souverain va se révéler très important. Comme il est possible de l’orienter dès son enfance, puis à l’âge adulte, on sait généralement quelles sont ses forces et faiblesses.

Heureusement, mon roi est un personnage cultivé et sociable. Il sait donc désarmer certains conflits qui auraient pu se révéler désastreux. Ainsi, grâce à mes choix éclairés, le voyage se conclut par un succès inespéré : j’ai mis en place une route commerciale très lucrative qui me donne des fonds à la fois à court et long terme. Il ne faut donc jamais hésiter à investir son argent dans ce genre d’entreprises proposées par le jeu.

Pour une économie assez faible comme la mienne, cet argent frais est inespéré. Bien sûr, dans d’autres parties, il m’est arrivé d’avoir un résultat bien moins heureux, et même de voir mon roi mourir lors d’une fête chez un vassal. On ne sait jamais ce qui peut arriver, et c’est aussi ce qui fait tout le sel de Crusader Kings II.

Rappelons-nous tous ces exemples historiques : Charles VIII de France qui se tue en se cognant trop fort la tête sur une porte du château d’Amboise, Henri II, toujours de France, qui meurt des suites d’une blessure lors d’un tournoi, et ce malgré l’intervention célèbre d’Ambroise Paré !

Et pour prendre un exemple écossais rappelé par Michel Duchein dans sa monumentale Histoire de l’Écosse : en 1290, la petite Marguerite qui devait hériter du trône meurt dans le difficile voyage qui l’amène de Norvège en Écosse. Ce faisant, elle déclenche une terrible crise de succession où des personnages célèbres comme Robert Bruce et William Wallace interviennent contre l’Angleterre qui s‘était immiscée dans les affaire de sa voisine du nord… Le jeu rend bien tout ceci à mon sens.

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Et cette année 880 voit un nouveau succès.
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Régulièrement des voyages et pèlerinages seront proposés au joueur. Ils peuvent amener de grandes récompenses, ou des morts stupides de son souverain.
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Il ne part pas seul, des prêtres l’accompagnent… Et pourront déclencher des situations cocasses.
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C’est là le cas: ils se perdent en discussions théologiques !! L’issue aurait pu être fatale pour mon voyage, mais mon souverain est doué en diplomatie et calme les esprits.
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Et mes efforts sont couronnés d’un superbe succès commercial.

Pour le moment, deux importantes menaces pèsent sur ma couronne. Tout d’abord un puissant membre de ma famille réclame de nouvelles terres ! Quelle audace ! Heureusement, j’en avais été averti par mes espions et j’ai débuté un complot visant à mettre fin à ses jours.

Toutefois, les qualités de mon souverain sont décidément bien utiles… Son caractère diplomate (on notera au passage la faute d’orthographe dans le jeu, la traduction reste loin de la perfection) permet de ramener l’insensé à la raison et d’éviter d’avoir à mater une assommante révolte. Quelle aubaine…

Mais, quelques mois après, révolte il y a bien lieu ! Elle ne vient pas de ma famille mais des Hébrides que j’ai conquises quelques années auparavant. La population y reste en effet majoritairement scandinave, et refuse ma tutelle. Menée par un chef local, elle prend les armes et espère retrouver son indépendance. On notera au passage la traduction catastrophique et que l’ennemi dispose de plus de 3.000 guerriers… Là où il n’y en avait qu’un bon millier lors de la conquête.

J’ai toujours détesté les révoltes dans les jeux de Paradox Interactive où les effectifs des révoltes sont souvent disproportionnés. Même commentaire dans les Europa Universalis où l’on se retrouve parfois avec des dizaines de milliers d’ennemis qui peuvent réapparaître en l’espace de quelques années. Vu la population historique de certaines provinces, comme là les Hébrides, c’est assez peu réaliste.

C’est sur ces bons mots que se conclut cette première partie du récit consacré à l’Écosse. Nous verrons la prochaine fois la suite du long règne de mon roi. Gageons qu’il sera aussi bénéfique pour son pays que ce début de partie assez prometteur !

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Là encore les capacités intellectuelles de mon souverain permettent d’éviter une sanglante révolte de la part d’un vassal ambitieux et qui plus est de ma famille. Malheureusement historique: songeons à Gaston d’Orléans, frère de Louis XIII et en révolte contre le pouvoir…
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Par contre je ne peux éviter la révolte des populations scandinaves des Hébrides, encore mal arrimées à mon royaume. Fourbissons les armes !

A suivre …

Pour plus d’informations sur Crusaders King 2, voyez nos différents articles dans nos archives ainsi que cette fiche sur Steam ou celle-ci chez Paradox.

A lire également sur mon site consacré à l’histoire militaire et sur le même sujet mais concernant une époque différente l’article Les Romains et l’Ecosse, la première partie se trouvant directement ici, et la suite par là dans mes archives.

2 Commentaires

  1. Fort intéressant tout ça ! Je vois qu’on partage -forcément- la même opinion concernant les rebelles dans Europa Universalis… Quelle plaie, quelle que soit la version du jeu d’ailleurs. Malgré les plaintes à répétition venant des joueurs, il est assez surprenant que personne chez Paradox ne semble juger bon d’y remédier. Personnellement je considère ce problème comme étant ce que les anglais appellent un game breaker. La suite de cet AAR promet malgré tout de bons moments !

  2. Merci pour le lancement de cet AAR ! Toujours apprécié cet opus, mais suis devenu réfractaire à steam … au aujourd’hui sans DRM free je n’achète plus, question de principe. En espérant que d’ici quelques années nous verrons poindre sur gog CK2 ou EU4 … en attendant je suis avec attention cet AAR au pays du chardon !

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