War Plan Pacific est conçu pour être un jeu léger et rapide à jouer. L’ambition ne manque pas d’audace puisqu’il s’agit de rien moins que de pouvoir jouer une partie en 2-3 heures. Un choix de conception aussi draconien impose évidemment quelques contraintes. Il faut limiter le nombre d’unités à gérer, utiliser des mécanismes assez simples pour que l’on puisse passer ses ordres en moins d’un quart-d’heure tout en ayant une bonne visibilité sur les résultats qu’on en attend. Et il faut malgré tout offrir à chaque joueur de vrais choix stratégiques, si possible renouvelés d’une partie sur l’autre. Il s’agit donc de rien moins que de concilier la légèreté à l’élégance. Comment s’en tire War Plan Pacific ? Voilà ce que je vais vous décrire ici.

 

War Plan Pacific est un jeu sur PC jouable sous Windows (XP et Vista), édité par Shrapnel Games et développé par KE Studios. Un éditeur indépendant, un développeur indépendant, il n’en fallait pas moins pour commercialiser un jeu qui s’annonce atypique à bien des égards. Le jeu était initialement prévu pour être mis sur le marché en novembre. Quelques menus soucis de dernière minute ayant convaincu le programmeur de repousser la date, c’est finalement mi-décembre que War Plan Pacific prit son envol.

War Plan Pacific est conçu pour être un jeu léger et rapide à jouer. L’ambition ne manque pas d’audace puisqu’il s’agit de rien moins que de pouvoir jouer une partie en 2-3 heures. Autant le préciser tout de suite : si cela reste possible avec un peu d’entrainement et dans des configurations favorables avec un adversaire prêtant le flanc à vos savantes manœuvres, cela reste tout de même un minimum. Personnellement, une partie un peu sérieuse me prend plutôt 5 ou 6 heures, que ce soit en solo ou en multi. Mais ne chipotons pas sur les détails : sur le fond, le but affiché est bien atteint et War Plan Pacific est un jeu dont on peut finir les parties dans l’après-midi.

Un choix de conception aussi draconien impose évidemment quelques contraintes. Il faut limiter le nombre d’unités à gérer, utiliser des mécanismes assez simples pour que l’on puisse passer ses ordres en moins d’un quart-d’heure tout en ayant une bonne visibilité sur les résultats qu’on en attend. Et il faut malgré tout offrir à chaque joueur de vrais choix stratégiques, si possible renouvelés d’une partie sur l’autre. Il s’agit donc de rien moins que de concilier la légèreté à l’élégance. D’autres s’y sont cassé les dents. Comment s’en tire War Plan Pacific, voilà ce que je vais vous décrire ici.

La carte & le niveau stratégique

Une partie se joue en tour par tour simultanés, un tour de jeu représentant un mois historique. Un tour se décompose en deux grandes phases :

  • une phase de mouvement pendant laquelle chaque joueur constitue des Task Forces avec les navires à sa disposition et leur affecte des missions
  • une phase de combat pendant laquelle, pour chaque bataille, les joueurs attribuent les ordres ad hoc à la flotte et aux avions engagés.

Chacune de ces deux phases se résout en aveugle (on ne peut pas connaître les ordres de l’adversaire) et en simultané.

Le scénario standard commence en décembre 1941 avec la simulation de l’attaque de Pearl Harbour par les Japonais (7 décembre).

La carte se joue sur 29 bases contrôlées par l’un ou l’autre joueur sur le théâtre Pacifique. Quatre d’entre elles sont des centres de population : Home Island (le Japon), West Coast, Brisbane et Ceylan côté Alliés. Les deux différences entre ces bases et les bases classiques sont les suivantes :

  • elles peuvent être attaquées mais pas conquises par l’ennemi
  • si l’ennemi les bombarde, la population locale s’en émeut ce qui contraint le joueur à patrouiller la zone pendant 1 à 4 tours. Les navires affectés à ces patrouilles risquent donc de faire défaut ailleurs sur le champ de bataille.

Les bases ont une caractéristique essentielle : leur taille, qui va de ruines inutiles à base majeure. Chaque base possède une défense aérienne et une capacité d’accueil ou de réparation de navires, l’une et l’autre proportionnelles à sa taille. Les navires de gros tonnage (porte avions et cuirassiers) ne peuvent relâcher que dans une base majeure.

Les unités du jeu sont donc les navires et l’aviation de combat. Aucune unité terrestre n’est modélisée. Les navires sont sommairement rangés dans quelques classes : porte-avions, cuirassés, croiseurs lourds ou légers, transports de troupes et convois de ravitaillement. Tous ces navires ont une vitesse, un blindage et un armement propre, ce dernier représenté par le nombre des canons principaux et la taille des munitions. Plus un blindage est épais, moins les munitions d’une taille donnée auront une chance de le percer. Les porte-avions ont également une capacité d’emport indiquant combien d’avions ils hébergent quand ils sont au mieux de leur forme. Leur capacité diminue avec les dégâts. Il y a 4 classes d’avions : les chasseurs pour la supériorité aérienne ainsi que 3 types de bombardiers (bombardiers classiques, bombardiers en piqué, lanceurs de torpilles) pouvant s’attaquer aux unités et endommager les bases.

Pour tous ces paramètres, aucune table de résolution n’est fournie. Inutile de faire de savants calculs : l’intuition et le bon sens président aux estimations.

Pour déplacer ses unités, le joueur doit constituer des Task Forces. Une Task Force est simplement un conteneur dans lequel le joueur place les navires qu’il veut. Les navires peuvent être au port (inactifs, en réparation) ou dans une Task Force. On peut les ré-affecter d’une Task Force à l’autre sur la même base. Ainsi la Task Force « Striking Force » au Japon, ci-dessus, comprend-elle 7 porte-avions, 3 cuirassés lourds, 3 cuirassés, 2 croiseurs lourds, 3 croiseurs. Pour visualiser les navires au port, il suffit de cliquer sur l’onglet «In Port ». Pour affecter des navires à une nouvelle Task Force, il suffit de les sélectionner en cliquant dessus, puis de les faire glisser sur l’onglet de la Task Force cible. C’est aussi simple que cela.

Une fois les Task Forces constituées, il convient de leur affecter des missions. Pour ce faire, il suffit de sélectionner la Task Force à utiliser puis de cliquer sur sa destination. Si la destination est une base amie (y compris la base de départ), la mission est une patrouille défensive. S’il s’agit d’une base ennemie et que la Task Force contient des transports de troupes, c’est une tentative d’invasion. Si la Task Force n’a pas de troupes, c’est un simple raid.

Quelques contraintes élémentaires limitent l’ampleur des déplacements : on ne peut pas « sauter » par dessus une base adverse. Par exemple, avant de pouvoir prendre Borneo, les Japonais doivent contrôler Luzon. Une fois Luzon entre leurs mains, ils pourront lancer des attaque sur Java, Singapour et envisager d’aller taquiner la population civile de Ceylan. Une exception existe si vous contrôlez une base isolée du reste de votre territoire. Imaginons par exemple, sur la carte ci-dessous où les lignes de déplacement ont été matérialisées, que les Alliés s’emparent de Truk en même temps que les Japonais capturent Rabaul.

Au début du tour suivant, Truk se trouvera isolée du reste des possessions des Alliés. Si la flotte qui s’y trouve tente de rallie Port Moresby, elle devra passer au travers de la « zone de contrôle » de Rabaul. Si les Japonais y ont stationné une flotte, il pourra y avoir un mouvement de réaction automatique pour intercepter les navires américains en retraite.

Les informations sont matérialisées avec une grande lisibilité : les figurines près des bases signalent la présence de navires. Plus la figurine est grosse, plus il y a de navires. Si une ancre apparait, il y a des navires au port. La figurine représente le plus gros type de navire présent. On voit par exemple facilement si il y a une importante force navale japonaise avec des porte-avions à Formose, une flotte modeste sans porte-avions à Truk, etc. Si une pastille à fond blanc apparaît, il y a des transports de troupes sur cette base. Si une pastille avec des jumelles est placée, c’est qu’au moins une Task Force a pour mission de patrouiller la zone, ce qui assurera sa défense et contribuera à développer la base. S’il y a une cible, c’est qu’une mission d’invasion est planifiée. S’il y a un cercle, il ne s’agit que d’un raid. Les lignes de déplacement des Task Forces sont matérialisées en jaune pâle. En plaçant le curseur sur l’une d’elle, on la surligne en jaune vif. En plaçant le curseur sur une base ciblée par un raid ou une invasion, on surligne toutes les lignes de déplacement des Task Forces devant mener cette mission.

Cet exemple démontre l’une des grandes qualité du jeu : son ergonomie visuelle irréprochable conçue selon les meilleurs principes du genre. La signalétique est sobre, intuitive, dépourvue d’ambiguïtés, les détails secondaires sont gommés pour laisser place à l’essentiel. On retrouvera le même parti-pris de simplicité pour les écrans de combat. Il faut insister sur ce point car il s’agit à mon sens d’une des clés de la réussite de ce jeu : la très grande ergonomie de l’interface est une condition sine qua non pour des parties rapides et fluides.

L’écran de bataille

Bien sûr, le but de tout cela est de mener ses forces à la bataille. Le jeu se déroule en tour par tour simultané, les missions des deux adversaires sont donc exécutées en parallèle. Une fois que chaque joueur a validé ses ordres de mission, le logiciel calcule les trajectoires et détermine s’il y a des batailles.

Là encore, les procédures ont été épurées à l’extrême. Il y a bataille quand une Task Force arrive sur une base ennemie. Seule exception : dans certaines configurations de jeu (base isolée en territoire ennemi) il est possible que des Task Forces en patrouille sur une base puissent intercepter une flotte ennemie passant à proximité même si cette flotte ne vise pas la base en question mais un objectif plus lointain. Ce sera la seule concession de War Plan Pacific à la notion de ZOC. Quant au reste, ne rêvez pas de grandes manœuvres techniques avec positionnement de navires, de gestion des lignes de tir etc. Rien de tout cela ici : vous affectez une flotte à une mission, elle y va, s’il y a des importuns elle castagne ou se retire sur la pointe des pieds, point barre. Voyons donc de plus près comment se déroulent les combats.

Si l’une des Task Forces en présence possède des avions, la bataille s’ouvre par l’écran de bataille aéronavale. Vous êtes en bas, l’adversaire est en haut. Le premier round s’engage. Votre flotte a trois actions possibles : elle peut tenter une retraite, rester à distance suffisante pour engager une bataille aérienne tout en évitant les canons ennemis, ou encore s’approcher à portée des navires en face. Deux boites permettent d’affecter les avions en attaque ou en défense. Par exemple, pour affecter l’escadrille de 34 chasseurs en défense, il suffit de la sélectionner et de la faire glisser sur la boite « CAP ». Les avions en « strike » d’un camp se battent avec les avions en « CAP » du camp adverse. Les chasseurs de l’attaquant s’en prennent aux chasseurs en défense. S’il en reste, ceux-ci tentent de détruire des bombardiers ennemis. S’il reste des bombardiers en attaque, ceux-ci exécutent leur mission en attaquant les bases ou les flottes ennemies.

Chaque joueur affecte une mission à ses escadrilles et choisit secrètement sa tactique en cliquant le bouton d’action approprié. Une fois les ordres des deux joueurs enregistrés, les positions respectives des avions apparaissent et le round se résout. Par exemple lors du premier round de l’engagement à Pearl Harbour, les Japonais ont une force aérienne conséquente qu’ils vont utiliser de façon très offensive en cherchant le contact. Les 11 chasseurs Américains en défense ne feront pas long feu face aux 69 Zéros en supériorité aérienne, ce qui laissera le champ libre aux bombardiers. La marine américaine va en prendre un coup.

Une fois le premier round résolu, le programme vérifie s’il y a lieu d’engager un deuxième round. Si tout le monde esquive ou fuit, il n’y en aura pas. Si l’un fuit et l’autre poursuit, il y aura peut-être un round de plus. Si les adversaires restent à portée, le deuxième round s’engage à coup sûr. Ces informations sont matérialisées à l’écran par de petites animations : les icônes des avions se déplacent vers leur cible, les compteurs s’ajustent, les navires endommagés ou coulés sont repérés par leur jauge verte/rouge, l’icône de la flotte attaquante sur la barre centrale se rapproche ou non de sa cible. Il peut y avoir deux rounds d’approche avant que s’engage un éventuel combat naval.

L’écran de bataille navale est très semblable, les avions en moins. Quelques règles simples régissent le positionnement des navires : les transports et les porte-avions sont mis en seconde ligne pour ne pas subir de feu direct, si toutefois les rapports de force autorisent une telle couverture. De même, les échanges de tir, les tentatives de désengagement, dont le succès dépend de la vitesse et de l’état des navires sont modélisés simplement. La distance parcourue par chaque Task Force pour arriver sur le lieu de la bataille influe sur son état de fraîcheur, lui donnant un malus plus ou moins important au combat. Le défenseur peut tenter d’appeler à la rescousse les Task Forces patrouillant sur les bases voisines s’il y en a. Les renforts mettent un ou deux rounds à arriver, ce qui peut suffire à perdre la bataille… ou à en inverser le cours.

Une fois résolus les quelques rounds de bataille navale, si l’attaque correspond à une mission d’invasion et si les navires défenseurs sont défaits, les troupes débarquent et tente de capturer l’objectif. Les opérations terrestres ne sont pas modélisées. Seuls sont modélisés les bombardements affaiblissant les défenses et les infrastructures, le calendrier de l’invasion qui a généralement 2 ou 3 « jours » pour réussir (un round de bombardements / calculs par jour) et le statut final de l’opération.

Les règles de déplacement limitent bien entendu la portée des flottes : vous ne pouvez pas vous enfoncer tout de go en territoire ennemi, il faut procéder progressivement en vous emparant des bases nécessaires à votre expansion. Il faut placer vos flottes correctement pour éviter les malus dus à l’attrition. Il faut essayer de deviner les actions de l’adversaire pour optimiser les vôtres. Le grand charme de toutes ces opérations, c’est finalement qu’elles s’effectuent en simultané. Chaque tour est donc l’occasion d’un certain suspense, le rythme rapide et nerveux du jeu permettant de garder la tension tout au long de la partie sans grande lassitude.

War Plan Pacific

 

War Plan Pacific

 

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War Plan Pacific

 

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Conditions de victoire et autres considérations

Bien entendu, tous ces déplacements et toutes ces missions ne sont pas planifiés dans le vide. War Plan Pacific propose quelques conditions de victoire à remplir. Dès que l’un de ces objectifs est atteint, la partie prend fin. Il y a quatre conditions de victoire :

  • couper l’accès au pétrole des Japonais : 3 bases fournissent du pétrole (1 point de réserves par mois). Les Japonais ont 6 points de réserves en début de jeu, ils en consomment 1 par tour et ne contrôlent aucun puits de pétrole. Il leur faut donc impérativement capturer et remettre en état l’une au moins de ces bases tout en contrôlant certains autres bases des environs qui, si elles restent aux mains des Alliés, annulent la production des puits. Cette règle s’applique automatiquement et simule les missions d’interdiction aérienne menées sur les convois de ravitaillement. Si les Japonais capturent et remettent en état plusieurs bases, ils pourront reconstituer et même améliorer leurs réserves, saine précaution pour les temps à venir. Mais tout au long de la partie, la défense de ces bases pétrolières sera une contrainte que le joueur Allié pourra exploiter habilement… si le Japonais lui en laisse le loisir et s’il ne choisit pas lui-même une des autres stratégies possibles.
  • couper les liaisons maritimes entre l’Australie et le contient américain : si les Japonais parviennent à capturer au moins l’une des trois bases stratégiques sur cette route maritime et à tenir leurs positions pendant 6 mois consécutifs, l’Australie signe la paix et la partie prend fin pour la plus grande gloire de l’empereur.

Si aucune de ces deux conditions n’est atteinte avant fin 1943, deux nouvelles conditions de victoire deviennent accessibles :

  • les B29 bombardent le Japon : à compter d’octobre 1943, certaines bases proches du Japon (Iwo Jima, Okinawa, Mariannes, etc.) peuvent servir de point de départ pour des raids à longue portée sur le territoire japonais. Si ces bases sont aux mains des Américains, ils accumulent un « point de bombardement» par base et par tour, simulant l’effet dévastateur des raids de terreur effectués par les B29 contre la population et les infrastructures civiles. A 25 points, le Japon capitule et les Alliés l’emportent.
  • à l’inverse, si la guerre s’éternise, les Japonais ont à chaque tour à partir de mars 1944 une chance croissante de l’emporter, la population américaine se lassant des tueries et exigeant la fin des hostilités.

En résumé, War Plan Pacific se présente sous la forme d’un jeu combinant une série de règles simples et élégantes permettant aux joueurs de décider rapidement des actions à entreprendre tout en leur laissant de nombreux choix. Tout l’art du stratège sera ici de combiner au mieux ces différents niveaux de décision :

  • sur le long terme, quelle condition de victoire privilégier (ou quelle condition de défaite éviter)
  • sur le moyen terme, où placer les flottes, quelles missions leur affecter ? Patrouiller une base permet de la renforcer. Plus une base est importante, plus elle peut abriter de navires et d’avions. Avoir une base avec une bonne couverture aérienne est un atout appréciable pour sa défense, d’autant qu’il est possible de transférer des avions d’une base à l’autre et, lors d’une bataille, d’appeler en renforts les navires en patrouille sur les bases voisines s’ils n’ont pas été engagés en combat par ailleurs. Ce second niveau de décision se conçoit aussi comme une sorte de jeu de poker : où vais-je attaquer, où l’ennemi va-t’il attaquer, comment puis-je le piéger sans me faire piéger moi-même ? Les quelques contraintes pesant sur les déplacements des Task Forces permettent de filtrer un peu le jeu des possibles : il faut avoir des lignes de communication et des voies maritimes praticables pour se déplacer. Plus une Task Force a de distance à parcourir avant d’attaquer, plus son malus au combat est élevé, c’est un détail qui peut faire la différence.
  • sur le court terme, lorsque survient une bataille, il s’agit d’affecter ses avions en attaque ou en couverture, de savoir si on tente l’approche sous le feu ennemi ou si l’on se retire (dépend des puissances de feu respectives, des vitesses et de l’état des navires).

War Plan Pacific ne fait pas vraiment figure de wargame classique. Je dirai plutôt qu’il s’agit d’une simulation grand-stratégique avec une ambiance et une philosophie un peu « jeu de plateau ». Cela n’enlève rien à la richesse du jeu qui, sur son créneau, se révèle être un excellent petit produit à l’ergonomie remarquable. Il y a place à de nombreuses options, il y a de l’incertitude, une petite part de chance mais surtout une grosse part de maitrise et d’intuition. Malgré les mécanismes assez épurés, les résultats des différentes batailles sont toujours réalistes.

Mon seul regret portera sur l’absence de modélisation des interceptions. Hormis le cas assez rare de mouvements de réaction lorsqu’une flotte ennemie traverse une zone contrôlée par vos bases, rien n’est prévu. Imaginons que vous, Fils du Soleil Levant, ayez monté dans les Mariannes une Task Force de belle taille pour aller mettre un raclée au Yankees enterrés à Midway. Dans le même temps, les Yankees en question ont préparé une flotte d’invasion pour venir polluer les Mariannes avec leurs chewing-gums et leurs cannettes de soda. Novembre 1942, les deux flottes s’ébranlent de conserve… et se croisent mine de rien en route. Chacune se rendra à son but et accomplira sa mission, tout bêtement.

Quelques détails techniques

Les conditions de victoire et leur statut sont rappelés en haut de l’écran. Quatre boutons en bas à droite permettent d’accéder en un clic à la liste des navires de votre camp (A), la liste de vos Task Forces (T), aux messages du tour (V) ou de visualiser les lignes de déplacement entre les différentes bases (N).

Les scénarios sont des fichiers assez simples au format XML. Le jeu de base propose 1 scénario standard ainsi que 2 scénarios alternatifs pour les parties en solo, un pour chaque camp en variant les conditions de victoire. Il est possible d’éditer soi-même son propre scénario en changeant les paramétrages pour d’autres éléments : forces en présence, positions de départ, caractéristiques des unités, etc.

L’I.A. n’est pas franchement mauvaise, pas pire que chez la plupart des concurrents en tout cas, mais elle ne fait évidemment pas le poids contre un humain. En début de partie, elle peut causer quelques soucis. Par la suite, elle a tendance à faire une fixation sur quelques points stratégiques. Si vous jouez les Japonais, assurez votre approvisionnement pétrolier dans les premiers mois et précipitez-vous par exemple sur les Fiji via Tarawa afin de couper les liaisons avec l’Australie ; c’est la victoire assurée courant 1942. L’IA ne sait pas contrer cela, disperse ses contre-attaques et s’affaiblit en vain sans reprendre le terrain perdu. Par contre, si vous jouez les Alliés, la partie sera plus difficile, l’IA exploitant assez bien l’avantage numérique initial (et provisoire) des Japonais.

Heureusement, il est possible de lancer des parties par TCP/IP pour affronter un adversaire humain. C’est là sans aucun doute que War Plan Pacific prend toute sa saveur. La procédure de connexion est, comme tout le reste, assez simple. L’un des deux joueurs crée la partie en réseau et se dévoue pour faire le host. Il communique à l’autre joueur son adresse IP qui ouvre le jeu en réseau et tente de se connecter à l’adresse indiquée. Le host accepte la connexion et la partie commence.

A ce propos, ne communiquez pas l’adresse IP que vous donne le jeu : celle-ci, en 192.168.xxx, est l’adresse de votre machine sur votre réseau privé. Elle est absolument inutilisable par votre partenaire. Pour trouver votre adresse IP externe, rendez-vous sur l’un des nombreux sites fournissant ce service (www.getip.com, www.whatismyip.com, etc). Il est possible que vous ayez des problèmes de connexion et que vous ayez à paramétrer votre routeur (livebox, freebox). Le jeu n’y est pour rien, vous pourrez vous en assurer en pingant l’adresse IP d’en face. Si le ping échoue, tournez vous vers votre routeur. Si ce genre de manipulations vous laisse perplexe, vous trouverez certainement de l’aide sur les forums de Shrapnel Games.

Le livret de règles, en anglais et en noir et blanc, ne brille certes pas son élégance ni par ses couleurs. Par contre, et c’est de très loin le principal, il est clair et complet. Cerise sur le gâteau, il nous offre une dizaine de pages en annexe sur l’historique de la Guerre du Pacifique ainsi que quelques notes de conception.

La version initiale du jeu comporte très peu de bugs. Le seul qui puisse être un peu gênant est celui qui annule les missions d’invasion quand on oublie de placer au moins un porte-avions dans la flotte d’invasion. En attendant le patch en préparation, il n’est heureusement pas bien difficile de s’astreindre à cette manipulation.

En conclusion…

Avec War Plan Pacific, KE Studios et Shrapnel Games nous proposent un petit jeu bien sympathique. Certes, il ne satisfera pas les purs grognards amateurs de War in the Pacific et de micro-gestion massive, mais telle n’est pas son ambition. Par contre, pour une partie au pied levé à titre de détente dominicale, c’est fort bien pensé. Le jeu semble d’ailleurs avoir trouvé rapidement son public. Son espérance de vie est probablement correcte vu le nombre de combinaisons disponibles, à condition de n’en point jouer 5 parties dans le week-end. Mon seul regret, mais il s’applique à la plupart des jeux : vu la faiblesse de l’IA, il faut pouvoir trouver un partenaire pour le jeu à deux en réseau. C’est faisable certes, mais tout de même moins facile à mettre en place qu’une bonne partie par mail. C’est probablement là, pour ceux qui auront du mal à trouver un partenaire disponible aux mêmes heures qu’eux, que l’espérance de vie du jeu en prendra un coup.

Pour finir, attribuer une note globale à un jeu est rarement chose facile. C’est pourquoi je détaillerai un peu les appréciations par poste avant le verdict global :

  • finition (bugs, livret de règles, délais de livraison) : 8/10
  • ergonomie (lisibilité de l’interface, gestion des écrans, accessibilité des informations) : 10/10
  • complexité : 4/10
  • profondeur de jeu, rejouabilité : 6 ou 7/10

En tant que wargame, War Plan Pacific me semble tout de même un peu léger. Un authentique grognard attaché à détailler la couleur les boutons d’uniformes et le minutage des missions aériennes n’y trouvera pas son compte. Mais sur le créneau qui est le sien et pour les objectifs qu’il s’est donné, il n’est pas loin d’être irréprochable. Sur son créneau, je proposerai donc une note globale de 8/10 en insistant bien sur le fait que c’est un jeu de niche qui ne peut pas plaire à tout le monde.

  • Finition et interface
  • Simplicité et rapidité
  • Rejouabilité et manuel complet
  • Complexité (surtout pour un wargamer averti)
  • IA, correcte mais rien ne vaut pour ce type de jeu un adversaire humain
Infos pratiques

Date de sortie : décembre 2008

Site officiel (une démo est disponible).

Prix : 34.95 $

NDLR : article publié en 2009 sur Cyberstratège.

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