Un jeu de combats tactiques en tours alternés basé sur l’univers très riche du Warhammer 40K de Games Workshop. Un moteur 3D issu de l’évolution de celui créé pour la fameuse série des Battle Academy. Un studio de développement motivé réalisant ce jeu pour l’éditeur réputé Slitherine. Des graphismes inspirés du travail remarquable d’un artiste peintre tel que Duncan Rhodes. Tout semblait laisser augurer d’une jolie réussite… mais ne dit-on pas que l’enfer est pavé de bonnes intentions ?

Tout avait bien commencé, avec ces velléités clairement exprimées par Straylight Entertainment de coller au plus près du modèle fourni par Games Workshop, le jeu de figurines Warhammer 40K. Ainsi que l’expliquait l’un des portes-parole dans la transcription que nous faisions le mois dernier d’une interview, cela passait par le développement d’un nouveau moteur 3D basé sur celui du fameux Battle Academy. S’il est vrai que depuis sa sortie en version bêta sur Steam le jeu, au travers de ses graphismes notamment, suscite quelques critiques de joueurs oubliant allègrement l’état global des wargames depuis leurs origines, sur le plan visuel, le fait est qu’aux yeux de nombreux autres plus pondérés dont je fais partie, le résultat apparaît comme parfaitement convaincant et satisfaisant. Au moins en ce qui concerne la modélisation des diverses unités.

Difficile, si on omet certaines productions d’Eugene System (le récent Act of Aggression) ou encore de Creative Assembly (la série Total War), de juger médiocre les graphismes de ce Sanctus Reach. Si on devait tenter une comparaison, la série Combat Mission semblerait plus appropriée. Certes, certaines textures ou éléments décoratifs peuvent sembler peu élaborés mais globalement le travail artistique souffre de rares lacunes. Ce sont essentiellement les animations, spécialement lors des combats au corps à corps, qui trahissent une certaine pauvreté mais il convient d’admettre que celle-ci n’existe qu’au bénéfice d’une exigence matérielle restant dans les limites basses du raisonnable.

Le jeu dans son ensemble ne nécessite qu’une configuration très abordable au commun des mortels, à l’inverse d’un Total War – Warhammer nettement plus exigeant. Ce n’est donc pas sur cet aspect visuel purement subjectif que se concentre le gros des critiques pouvant être adressées à cette adaptation sur PC.

Ceux d’entre vous ayant parcouru notre article consacré à l’interview du mois dernier auront certainement en mémoire qu’il y était mentionné comme exigence du studio, le fait de fournir aux joueurs les informations essentielles concernant les unités. En effet, il n’a pas échappé aux développeurs qu’il s’agit ici d’un univers totalement imaginaire, relatant un conflit fabuleux mettant aux prises des forces créées de toutes pièces par les imaginations fertiles chez Games Workshop.

Peu importe que vous soyez féru d’histoire militaire ou spécialiste des canons de marine de la première guerre ou de la seconde. Les éléments mécaniques seuls conservent parfois, visuellement, une hypothétique filiation avec ce qu’on peut connaître dans la réalité. Impossible de deviner quel armement embarque un War buggy ou une escouade de Loota boyz orks. Ni s’il peuvent venir à bout d’un Dreadnought ou d’une unité de Grey hunters sans avoir sous le nez -ou en mémoire- leurs caractéristiques détaillées, ainsi qu’un minimum de mise en situation “historique”.

Visuellement le jeu n’a pas à rougir face à la concurrence.
Initialement, les troupes sont choisies pour le joueur. Les batailles suivantes permettent un choix plus libre ; les unités disponibles seront plus ou moins expérimentées.
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Rapport de bataille où l’on remarque que, curieusement, les grenades ne sont pas en dotation d’office.
Deux campagnes c’est bien mais jouables seulement d’un point de vue, c’est bof. Vivement les extensions !

Cette équation dont l’énoncé avait pourtant bien été discernée par les concepteurs n’est pourtant qu’à moitié résolue dans la pratique. L’interface du jeu s’avère trop souvent peu ergonomique et ce dès le didacticiel, plutôt mal pensé et chichement réalisé. On s’aperçoit que la prise en main -même si en réalité elle demeure tout à fait possible sans trop se prendre la tête, pour peu qu’on ait un minimum pratiqué ce type de wargames tactiques- va s’avérer finalement assez incommode.

Si le jeu permet effectivement d’avoir relativement aisément les informations capitales concernant les armes et leurs caractéristiques essentielles -portée maxi et capacité létale, pénétration de blindage, etc.- il manque cruellement des détails sur les unités elles-mêmes et leur usage respectif.

Seule l’expérimentation, au gré des batailles, permettra de se faire une idée précise des utilisations possibles d’un Terminator impérial ou d’une escouade de Gretchins. Précisons de nouveau que ces remarques concernent essentiellement les joueurs peu familiers de l’univers WH 40K ; pour les vétérans, les choses s’avèrent heureusement plus abordables.

Le didacticiel donne le ton en effet. Si sa présence rassurante dans le menu principal constitue un bon point, le fait est qu’il se résume à un unique simulacre d’engagement, très court, ne permettant pas en définitive d’acquérir réellement les mécanismes subtiles du jeu. Sauf à suivre également les deux vidéo proposées sur le site de l’éditeur. Encore faut-il quitter le jeu, disposer d’une connexion Internet et avoir la patience, ainsi que le niveau en Anglais, nécessaire pour les comprendre. On aurait préféré un peu plus d’implication et la réalisation de quelques leçons interactives supplémentaires accessibles depuis l’interface. Service minimum donc sur ce plan.

Ce premier contact s’avère néanmoins prometteur. Le scénario global, prétexte à introduire les deux campagnes du jeu laisse en effet augurer de missions intéressantes et possiblement variées. Déception supplémentaire lorsqu’on comprend, après quelques batailles, qu’en définitive les objectifs de victoire se limitent à capturer au moins un emplacement supplémentaire par rapport à un adversaire pour qui stratégie et plan de bataille se résument en un mot : WHAGG ! Traduction pour les newbies : l’ork est le pire des bourrins qui soient !

Les campagnes, attirantes sur le papier se révèlent une succession de combats type escarmouches comparables à celles qu’on peut créer soi-même dans le module du même nom. Entrecoupées de rencontres scénarisées, certes plus intéressantes dans leurs principes mais trop peu nombreuses ; ce qui change alors étant en général les objectifs de victoire et la nature des unités adverses.

Visuellement et sonorement, l’ambiance est relativement bien restituée, avec des décors cependant assez comparables à ce qu’on trouve dans un jeu comme Armageddon ou Da Orks (voir cet article), sombres et monochromes. Les unités accessibles au joueur sont nombreuses et fidèles à leurs contreparties du jeu de plateaux. La partie stratégique, entre chaque bataille, sur une carte du monde d’Alaric Prime où chaque région est découpée pour représenter un affrontement à venir fait en revanche pâle figure. Tout cela est totalement linéaire, bien qu’on puisse choisir entre telle ou telle zone où combattre. Aucune notion de ravitaillement, d’acheminement des troupes ou autres données stratégiques à prendre en considération ; vous choisissez entre une bataille au nord, au centre ou au sud, voilà tout !

Vient ensuite un briefing indiquant globalement vos positions de départ et celles de l’ennemi. Puis le choix des unités qui combattront pour vous… Elles prennent de l’expérience au fil des combats, ce qui de fait exclut rapidement les moins expérimentées. Sachant qu’une unité détruite peut cependant se retrouver dans la suite de la campagne, on comprend vite que celles du départ seront celles qui vous suivront jusqu’au bout, si vous avez la chance, la patience et l’envie de poursuivre jusque-là. Un mode Permadeath -ou chaque destruction serait irréversible- aurait autrement pimenté le tout.

Les combats, justement ; force est d’admettre qu’ici se cache le point fort du jeu, ce qui est heureux ! En dépit de nombreux problèmes liés à l’ergonomie perfectible ou à des limitations relatives aux tirs de réaction capricieux, le fait est qu’on s’amuse à massacrer de l’ork à tout va. Les tirs de réactions sont certainement ce qui fâche le plus dans ce titre. Un seul et unique tir par unité, en fonction de son orientation.

Il serait intéressant de pouvoir, par exemple (celui de l’éternel WinSPWW2, décidément référence indétrônable), décider si telle unité ouvrira le feu sur tel type de cible ou tel autre, en fonction de ses capacités anti-blindage ou anti-personnel. Mais non, quel que soit l’objectif, il faudra s’accommoder de voir vos unités de combat au corps à corps tirer sur un blindé en approche, même si cela ne fera qu’en écailler la peinture.

Parmi les problèmes les plus gênant rencontrés durant les parties, outre l’équilibrage parfois douteux, on note certains points qu’il convient de mentionner. Chose surprenante pour un habitué des wargames historiques, l’utilisation des transports de troupes comme les Rhino laisse une impression curieuse. On se dit qu’on vient de découvrir un bug dont l’exploitation met mal à l’aise. En effet, il est ici tout à fait possible et même fortement conseillé, de charger son infanterie, déplacer l’engin au contact de l’ennemi, pour débarquer tout son petit monde et canarder derechef l’adversaire. Bien entendu, une fois cela fait, les livreurs de pruneaux pourront rembarquer comme si de rien n’était. Aucun délai ; aucune pénalité ! Autant dire que cela est perturbant, tout autant que jouissif ! Heureusement ce défaut du jeu sera corrigé dans un prochain patch.

Ne parlons pas de l’ordre de chargement du véhicule, inversé lors du déchargement, ce qui semble absurde et renvoi l’image d’un tableau Excel géré de façon basique. Autre comportement plus que douteux mais qui cette fois sent le bug à plein nez, lorsque des Burna Boyz viennent arroser de comburant vos unités, supposées à l’abri derrière un obstacle. Déconvenue régulière lors des combats faisant pour le moins désordre. Ici, un patch s’impose !

On constate avec plaisir cependant quelques bonnes initiatives, comme la modélisation du moral et des armes terrifiantes, comme les lance-flammes. Là aussi cependant, quelques bugs dans le comportement des unités supposées avoir le moral brisé sont à déplorer. Évidemment, à lire cet article on pourrait penser qu’encore une fois Games Workshop pressure sa licence Warhammer, avec pour unique considération l’aspect financier. Mais il convient d’admettre que malgré une certaine déception, ce jeu reste prometteur. Certains problèmes de gameplay, comme l’équilibrage, posent encore problème dans certains cas mais d’autres, comme les icônes d’unités difficilement repérables en vue aérienne ont été traités par les derniers patches. Ces corrections sont encourageantes pour l’avenir du titre. Espérons simplement qu’elles se poursuivront avec suffisamment de pertinence et de célérité au cours des mois à venir. Ce qui jusqu’à présent a été le cas.

La couleur et un léger goût de Final Liberation… mais ce n’est pas Final Liberation !
Attaque, défense, confrontation ou mode « symétrique », les choix du type de partie ne sont pas aussi explicites qu’on l’aimerait et surtout, l’IA ne comprends qu’un mot d’ordre : Attaquer à tout va !
Avec l’un des derniers patchs les icônes de faction sont enfin plus visibles, particulièrement en vue de dessus.
Bon point, l’éditeur comporte quelques écrans d’information fort pratiques.

Enfin le fait de ne pouvoir jouer que les Space Wolves en mode campagne procure également une certaine frustration, au regard des nombreuses possibilités offertes par l’univers Warhammer 40K. Gageons que des DLC viendront compléter l’offre d’ici peu (on attend des annonces confirmant l’arrivée de la Garde impériale et des armées du Chaos). En mode escarmouche, lui-même assez complet et bien qu’ici plus qu’ailleurs les lacunes coté documentation sur les unités soient encore plus prégnantes, la possibilité de mener au combat des troupes orks compense toutefois un peu la frustration.

Idem avec un mode multijoueurs intéressant par son concept assimilable au PBEM classique, chacun jouant son tour à son rythme, tout comme par le fait qu’il s’appuie sur le désormais bien connu système propre à Slitherine.

Quant à l’éditeur de batailles, relativement complet, il gomme une certaine aridité globale par des possibilités satisfaisantes pour créer assez rapidement des enchaînements de batailles. Comme pour le multi cependant, le succès du jeu fera ou non sa popularité ; on sait bien qu’un jeu peu pratiqué n’incite guère à s’investir dans la création de scénarios. On appréciera d’ailleurs que le studio ait mis en ligne, il y a peu, par ici sur YouTube, un tutoriel vidéo pour guider les concepteurs de scénarios.

Vu l’état moral de ces orks, après un coup de lance-flammes, la situation n’est pas si désespérée pour celui qu’on imagine…
Le lobby du mode multi-joueurs ; espérons voir apparaître un classement ou un système d’évaluation des participants, en fonction du nombre de victoire et du niveau de difficulté.
Notes
Multimédia
75 %
Interface
70 %
Gameplay
75 %
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warhammer-40-000-sanctus-reach-un-voeu-pieuxUn bon jeu mais avec incontestablement des défauts de jeunesse, voilà ce qui ressort du temps passé avec Sanctus Reach et autant le dire clairement, malgré un fort a priori positif en sa faveur, c'est bien une relative déception qui prévaut à l'arrivée. Certes, on peut excuser aux concepteurs que ce soit ici leur premier jeu, et ce de plus sur un nouveau moteur 3D. On peut et on doit espérer de nombreuses améliorations à venir, au gré des patchs. Mais le fait est qu'une fois de plus, en dépit d'un intérêt certain lié à cet univers si particulier et attachant, la découverte d'un grand jeu de combats tactiques à même de venir supplanter le souvenir de Chaos Gate restera, encore quelques temps au moins, un vœu pieux.

4 Commentaires

  1. Soyons clair SLITHERINE avait sortie un très bon jeu avec BATTLE ACADEMIE (j’avais joué trois campagnes avec un grand plaisir et l’effet répétitif n’est arrivée seulement qu’a la quatrième campagne donc génial) mais depuis Slitherine à clairement voulu exploiter commercialement son moteur avec en sortant en 2 ans des module “guerre en dentelle” puis “japon médiéval” et maintenant “Warhammer 40000” sans réellement travailler ou finir les produits.

    Ils ont les capacités de faire du bon boulot (expérience du wargame…) mais n’ont regarder que la marge. C’est pas très honnête

    • Qu’est-ce qu’il y a de pas très honnête ? Pike and Shot et la déclinaison japonaise sont quand même des bons jeux ? Le moteur est certes un peu limité, mais il y un joli contenu, original qui plus est. Quant à Sanctus Reach, en effet pour l’instant ça n’est pas encore bien au point. Cela dit l’éditeur avait annoncé qu’il s’agissait d’un nouveau moteur (une importante refonte de celui de Battle Academy), et que Sanctus Reach n’était que le début. C’est certain que pour l’instant, même si ça fonctionne à peu près bien dans l’ensemble, dans certains cas on a l’impression d’essuyer les plâtres. Toutefois vu le très bon suivi qu’il y avait eu pour BA, on aura très probablement la même évolution, sérieuse et régulière. Voire même avec un peu de chance on pourrait avoir une meilleure évolution, plus rapide. Difficile d’affirmer quoi que ce soit vu que l’éditeur communique peu sur ses projets en cours ou futurs. On sait juste que beaucoup de choses sont prévues.

    • Je ne vois ce commentaire qu’avec du retard mais je tiens à y répondre. Je comprends qu’on puisse ressentir une certaine frustration en constatant que SR exploite, une nouvelle fois, le moteur de BA. Il n’en demeure pas moins, comme le souligne Bertrand, que l’un et l’autre constituent des jeux divertissants qui remplissent plutôt pas mal leur cahier des charges. On peut effectivement reprocher à Slitherine d’avoir besoin et envie d’exploiter, de capitaliser sur ses acquis mais en toute honnêteté, à leur place, que ferions-nous ?

      Je me souviens d’un petit jeu de stratégie/gestion dont le titre m’échappe, qui proposait au joueur d’endosser le costume du PDG d’un studio de création de jeux vidéo. Après quelques parties, je m’étais surpris à adopter moi-même les attitudes qu’il m’arrive souvent de reprocher à ces mêmes studios, dans la vraie vie. C’est à dire, tenter par tous les moyens de maximiser mes profits (ceux de ma société, plus exactement) en rognant parfois sur les délais de parution et le temps de développement ou en négligeant les frais associés au service Q&A…

      Bref, tout n’est pas aussi simple qu’on l’imagine de loin et non, le monde de l’économie réelle n’est pas celui du passionné détaché des obligations contractuelles mais bien celui du CEO contraint avant tout de songer à la pérennité de sa boîte et à l’avenir professionnel des employés dont il paye les salaires ;)

      • N’ayant relu ce test que récemment et acquis cet opus il y a peu, et suite aux premiers échanges sur la preview, je ne peux qu’acquiescer !

        Ce Sanctus Reach malgré quelques défauts, reste vraiment un truc un peu à part dans les portages PC de la licence 40K. En tant que modeste pratiquant de W.40K et Battle, j’y retrouve tout ce que je pouvais attendre en terme de sensations communes au jeu de table originel. D’autant que le multi doit pouvoir palier aux défauts d’IA, promettant de belles échauffourées !

        Une réussite pour un jeu actuel, respectueux de l’univers et des codes de W40K sur table, permettant des parties relativement dynamiques et rapides, et visuellement agréables. Un bon kiff pour qui est allergique au temps réel survitaminé, et souhaite pouvoir bastonner à coup d’épée tronçonneuse avec l’envie de pouvoir conclure une escarmouche en une soirée.

        Ce “petit” moteur de jeu que ce soit sur Pike and Shot, Sengoku Jidai, BA, ou ce Sanctus Reach permet une approche divertissante sans être dénuée de qualité !

        Espérant quelques extensions venant étoffer cet opus W40K et pourquoi pas de nouveaux historiques !

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