Prenant la relève du vénérable Crusader Kings sorti en 2004, ce deuxième opus vous plonge une fois de plus en plein Moyen-âge, précisément entre 1066, date de l’invasion de l’Angleterre par Guillaume le conquérant, et 1452, à la veille de la chute de Constantinople. Durant cinq siècles il vous faudra lutter pour maintenir votre comté, duché, royaume ou empire la tête hors des eaux troubles et agitées de cette époque. Et pourquoi pas, devenir une des grandes puissances du temps ?

Environnement graphique et sonore

Évacuons  rapidement ces aspects peu importants dans ce genre de jeu. Crusader Kings II utilise à nouveau le moteur Clausewitz, propre au studio Paradox depuis Europa Universalis III. On aime ou pas les cartes 3D pour la grande stratégie, toujours est-il que tout est lisible, assez fin et propre.

Seuls les personnages sont assez peu lisibles sur la carte, ainsi que les provinces où un bâtiment est en construction, par exemple. Pour cela, il faudra zoomer de manière importante, ce qui n’est pas forcément pratique, mais pas rédhibitoire. La police de caractères est la même depuis Europa Universalis III et est bien pratique, le vert indiquant les bons points et le rouge les éléments à surveiller. Nous sommes aidés en cela par de nombreux raccourcis, filtres de carte et autres icônes communs aux jeux du studio. Par contre, la gestion des messages, qui sont toujours nombreux dans les jeux de Paradox, est un peu moins pratique qu’avant.

Au niveau de la musique, rien à redire. Andreas Waldetoft, compositeur attitré du studio depuis longtemps (il sévissait déjà sur Hearts of iron II), nous transporte efficacement dans le Moyen-âge, utilisant notamment des chœurs de toute beauté. Question de goût, certes. Mais comme toujours, on peut couper la musique pour mettre la sienne si besoin. Quant aux bruitages ils s’avèrent discrets, mais bienvenus.

On appréciera ou non que l’on puisse acheter des améliorations graphiques et sonores (des pistes en plus, des armoiries etc.) sous forme de micros-DLC vendus quelques euros chacun. Le procédé existe déjà depuis plusieurs jeux et chacun en pensera ce qu’il voudra. La version française du jeu, elle, est correcte, sans plus (il reste des mots non traduits, de la syntaxe peu heureuse). Mais nous sommes loin de la catastrophe de Victoria II à son lancement. Gageons que la communauté saura une fois de plus s’en charger !

Si on choisit ses amis, on ne choisit pas sa famille

En effet, dans Crusader Kings II, tout est une histoire de famille, d’héritages, de clans, de lignées, bref de dynasties, de féodalité. Avant de régner sur des territoires, vous incarnez le chef de votre clan, qu’il soit simple comte, duc ou roi. Ainsi, si vous n’avez pas d’héritier (les règles peuvent être changées sous condition), la partie est perdue. Il vous faudra donc gérer les fiançailles et mariages avec les meilleurs partis du temps (attention aux mésalliances), pour s’assurer alliances et descendance. L’éducation des enfants est aussi à prendre en compte, en leur nommant un mentor… Duquel ils récupéreront certains traits de caractère (tous les personnages en ont), positifs ou non.

Attention, donc. Plus votre domaine est grand, et plus votre famille l’est (branches cadettes, cousins éloignés etc.), d’autant plus que vous avez également une cour à gérer. Nous touchons là au cœur du jeu : il importe d’assurer la pérennité de sa lignée sous peine de la voir passer entre de mauvaises mains. De plus, si votre famille se déchire, des guerres de successions et autres rivalités moins graves peuvent se déclencher, notamment à votre mort (vous incarnez ensuite votre héritier, puis sa descendance).

Chaque personnage a son portrait, qui vieillit au fil du temps, du moins s’il parvient à l’âge adulte, ce qui n’est pas du tout automatique au Moyen-âge, et le jeu vous le rappelle parfois sévèrement, vous faisant mourir de phtisie dès vos 11 ans ou tuant coup sur coup tous vos héritiers, du choléra. Il est donc possible d’avoir des actions avec chaque personnage du jeu (positives ou non, car pousser un vassal turbulent à la révolte ouverte est un bon moyen de l’éliminer), et même d’ourdir des complots contre eux (gérés comme dans le sympathique Sengoku). Bien sûr, à la longue on peut craindre la micro-gestion (pour peu que l’on veuille garder un œil sur tout), mais vous n’avez de contrôle direct que sur les personnages évoluant au sein de vos possessions propres. Car, dans Crusader Kings II, après la famille, les territoires forment l’autre centre du jeu.

Domaine en début de partie (Thomond).
Famille en début de partie, 1066.
Le royaume d’irlande en 1146.
Pousser à bout un vassal.

La gestion des territoires

Sous peine de graves malus, votre personnage ne peut diriger directement qu’un nombre limité de provinces (qui dépendent de son rang, de la technologie, qui est par ailleurs assez anecdotique dans le jeu, etc.). Les autres, il faudra les déléguer à des ducs et autres comtes. C’est là finement géré car ceux-ci ont leurs propres vassaux (des évêques, des barons par exemple) et  gèrent leurs possessions, leur famille, comme ils l’entendent. Si votre contrôle sur eux est limité (par le biais des lois), ils pourront se faire la guerre entre eux par exemple. Ou revendiquer le trône en cas de lois de succession lâches. Les pressurer permettra par contre d’accroître vos impôts et le nombre de soldats qu’ils peuvent vous fournir en cas de guerre, mais vous les aliénera.

A vous de trouver le juste équilibre… Terres et famille se rejoignent également : faut-il accorder un duché à votre oncle jaloux qu’un bambin comme vous ait hérité de la couronne ? Cela peut le calmer, mais aussi lui donner les moyens de vous renverser… Bon reflet du temps !

Votre domaine propre vous fournit des troupes personnelles, l’ost, et de l’argent directement dans vos caisses. Soldats disponibles (les unités sont assez nombreuses) et rentrées fiscales s’améliorent grâce à une série de bâtiments à construire contre de l’argent et du temps. Ils sont aussi limités par la technologie, qui évolue lentement, par province.

Tout peut être amélioré grâce à vos proches conseillers, envoyés en mission dans les provinces, comme dans Sengoku. Bref, je ne saurais trop vous conseiller de débuter vos parties avec un petit duché, pour ne pas être débordé par la gestion des territoires. Rien de plus affligeant que de voir un comté lointain se révolter alors que vous bataillez ferme contre votre puissant voisin.

La diplomatie

On ne déclare pas une guerre comme on le veut dans Crusader Kings II, c’est souvent une question de temps et d’argent. En effet, il faut avoir une revendication valable sur les terres que vous convoitez. Pour cela, rien de mieux que d’envoyer votre chancelier créer de fausses revendications (avec le risque qu’il soit découvert) ! L’autre moyen est de créer un nouveau titre, et de le revendiquer, puis de conquérir  les domaines de vos voisins qui devraient en faire partie.

C’est ainsi que j’ai créé le royaume d’Irlande, qui me permet de prendre le contrôle de l’île (cf. screenshots ci-dessus). A noter que les sièges sont parfois très longs (il faut prendre chaque place forte de la province, ce qui peut être long) et les assauts très meurtriers. C’est très historique car les attaques directes furent en fait fort rares au Moyen-âge (trop coûteux).

Vos mariages vous allient aussi à d’autres familles, et celles-ci peuvent vous appeler dans des guerres lointaines ; or, refuser vous coûte une perte de prestige, l’un des deux éléments de score du jeu (de nombreuses actions, choix, le font croître ou décroître). L’autre est la piété, car lorsqu’on parle de Moyen-âge, et d’Histoire en général, la religion n’est jamais loin. Les puissances catholiques devront par exemple gérer leurs relations avec le Pape. Ce n’est pas anodin car celui-ci nomme généralement les évêques et encaisse leurs impôts ! Il peut aussi vous excommunier en cas de mauvaises relations ou appeler à la croisade, forme particulière de guerre que nous évoquerons ailleurs.

Bref, qui que l’on joue, il faut prendre garde à ne pas froisser l’autorité religieuse. A moins de nommer un antipape, comme le Moyen-âge l’a connu, à Avignon par exemple, et de partir en guerre contre elle ! On peut même embrasser l’hérésie cathare si l’on veut.

Conclusion

Crusader Kings II est un très bon jeu. Il est complet, varié et profond. Je n’ai pas non plus rencontré de bugs ou de ralentissements intempestifs. Paradox connaît son sujet, et ça se voit. C’est une nouvelle production offrant un bon plongeon dans le Moyen-âge. Cerise sur le gâteau, des liens in-game renvoient même vers des biographies de personnages historiques, comme les basileus byzantins. De plus, pour ceux qui hésiteraient encore à fonder leur dynastie au temps des croisades,  notez que le jeu est souvent en promotion sur les plates-formes de téléchargement.

  • Profondeur et réalisme
  • Respect de la période traitée
  • Durée de vie très importante
  • Quelques détails graphiques mineurs
  • Micro-gestion parfois envahissante (gestion de la famille)
Infos pratiques

Date de sortie : 14 février 2012

Disponible sur PC et Mac.

Prix : 40 euros (Gamersgate, Steam), environ 30 euros en boîte (Amazon…).

Site officiel : www.crusaderkings.com (où vous pouvez consulter le manuel du jeu ainsi que télécharger une démo). Voir aussi le wiki officiel.

5 Commentaires

    • Très long, même moyenne que pour les autres Paradox…. Même si la vitesse de jeu influe évidemment.

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