Disponible depuis le 14 juin, Death or Dishonor est ce que Paradox appelle un « country pack », c’est-à-dire que ce n’est pas une extension majeure mais un DLC qui s’intéresse surtout à quelques pays qui vont bénéficier d’ajouts précis… Même s’il y a également des nouveautés plus générales. Ainsi, après le Commonwealth dans Together for Victory c’est cette fois-ci l’Europe centrale qui est à l’honneur, ce qui est une bonne chose, car on va le voir, jouer ces pays « mineurs » devient désormais très intéressant.
Une focalisation sur l’Europe centrale
C’est le cœur de cible de Death or Disonor : des nouveaux arbres de priorités nationales pour certains pays d’Europe centrale, qui furent directement impliqués dans la Seconde Guerre mondiale. On parle là de la Hongrie, de la Tchécoslovaquie, de la Roumanie et de la Yougoslavie.
D’un côté, cela permet la suppression des arbres génériques et une vraie immersion dans les réalités de ces États qui virent les combats et / ou l’occupation allemande. Les noms des unités ont été revus, les voix correspondent aux pays, des portraits supplémentaires d’officiers et des noms des matériels, des firmes industrielles sont eux aussi nationaux et non plus génériques comme avant. Ce premier point est toujours appréciable, car permet toujours plus de personnalisation des parties et de respect de la réalité.
Toutefois, j’ai là juste présenté l’aspect le moins important. En effet, au-delà de ces ajouts sympathiques, les arbres de priorités repensés permettent enfin de jouer ces pays avec un réel intérêt car ils amènent de nombreuses possibilités. On peut notamment suivre la voie historique…
Citons par exemple le cas de la Hongrie, qui se rangea du côté de l’Axe et vit l’Allemagne exercer des arbitrages très avantageux pour elle qui perdit de très nombreux territoires suite au traité de Trianon en 1920-21. L’alliance avec Berlin lui permit notamment de dépecer la Yougoslavie et la Roumanie à son profit. Or, on retrouve cela et on peut envisager de jouer ce pays ainsi, tout en participant à l’invasion de l’URSS par la suite.
Pourtant, pour la plupart des États, l’histoire ne tourna pas à leur avantage : la Tchécoslovaquie fut démantelée en 1938 (conférence de Munich) et 1939 (occupation de la Bohème-Moravie), la Roumanie perdit des territoires au profit de la Hongrie (Transylvanie), de l’URSS (Bessarabie) et de la Bulgarie (Dobroudja), et la Yougoslavie qui connut un coup d’Etat pro-allié fut attaquée par l’Axe en réponse. Très rapidement vaincue avec l’opération Marita du printemps 1941, elle connut une occupation sanglante et où même les partisans se déchirèrent entre eux (royalistes et communistes de Tito notamment).
En conséquence, pour ces États, le DLC permet d’emprunter d’autres voies ou d’essayer de s’en sortir avec la voie historique. Et là, la rejouabilité est immense. On peut orienter le pays choisi vers les Alliés, l’Axe ou le Kominterm communiste à chaque fois. Évidemment, certaines positions sont plus tenables que d’autres : une Hongrie communiste en plein milieu d’une Europe aux mains de l’Axe aura peu de chance de succès, encore que… Ainsi, mes captures d’écran montrent une Yougoslavie qui s’est ralliée à l’Axe et a occupé avec succès une partie de la Grèce. On peut aussi renforcer les fortifications tchécoslovaques et se faire aider des alliés en 1938, faire passer la Roumanie dans le camp communiste, ce qui peut paraître judicieux avec une URSS frontalière, etc.
Je ne peux pas tout citer, mais je terminerai avec une possibilité qui est un très beau défi en termes de jeu : le joueur a le loisir de recréer l’Autriche-Hongrie, ce qui rappellera des souvenirs aux adeptes du mod 33 pour Hearts of Iron 2. De plus, c’est là moins fantaisiste qu’il n’y paraît car des tentatives de restauration existèrent bel et bien. Dans leur insuccès réside aussi le rôle ambigu de l’amiral Horthy, dirigeant de la Hongrie avec le titre très clair de régent, mais qui avait pris goût au pouvoir et gêna le retour du souverain. Henry Bogdan décrit cela très bien dans son Histoire des Habsbourg. Une fois recrée, on peut également l’orienter comme on le souhaite : neutre, proche de l’Axe etc. Là encore, on aimerait un peu plus de temps et que le jeu commence plus tôt, pour pouvoir mieux se préparer.
Bref, on parle de nombreuses possibilités pour ces États, d’une très grande rejouabilité et de quoi plaire aux amateurs d’uchronie. Bien sûr, certaines sont plus réalistes que d’autres et peuvent ne pas être appréciées. Heureusement, avant chaque partie il est possible de cocher une case qui conduit l’IA à choisir plutôt des voies historiques. Enfin, dans tous les cas, même avec les ajouts, certains États, comme pour la dernière extension, restent tout de même assez dépourvus de moyens industriels et en main d’œuvre, et ne sont donc pas faciles à jouer.
Je regrette aussi l’absence de nouvel arbre pour la Bulgarie qui, même si elle rentre dans la catégorie que je viens de décrire, eut cette position assez extraordinaire de combattre aux côtés de l’Axe, notamment en Yougoslavie et Grèce, mais sans déclarer la guerre à l’URSS. Ses forces, comme celles de la Roumanie, changèrent de camp à la fin du conflit.
Des ajouts plus généraux
A côté de cela, on trouve des nouveautés plus générales, notamment musicales avec trois nouveaux morceaux composés par Andreas Waldetoft, le compositeur attitré du studio. Personnellement j’aime bien son travail qui, depuis toutes ces années colle bien au sujet et est plaisant à écouter… Il m’arrive toutefois régulièrement de couper la musique et de mettre autre chose en fond sonore, cela dépend de chacun.
Notons aussi la possibilité très intéressante de convertir l’équipement ennemi capturé, ce qui est intéressant lorsque vous tombez sur des stocks adverses qui peuvent être importants… Cela reflète bien l’usage immodéré que firent les Allemands de matériels adverses, notamment les chars : on retrouve des blindés tchécoslovaques à peine modifiés dans leurs rangs, les panzers 35 (t) et 38 (t), des châssis français utilisés pour créer de l’artillerie… Notamment l’excellente chenillette Lorraine 37L, qui devient en partie de l’artillerie automoteur allemande, c’est-à-dire que le canon est monté directement sur un véhicule, et n’est pas traîné par un camion ou des chevaux. Je ne donne là que quelques exemples.
Dans le même ordre d’idée, il est possible, contre un certain coût en usines, de construire un matériel étranger sous licence. C’est-à-dire que l’on paie en quelque sorte les droits pour le fabriquer à l’identique chez soi. C’est une pratique très courante qui permet à la fois aux pays en retard technologiquement d’accéder à d’autres produits, mais aussi de fabriquer bien plus vite chez soi un matériel universellement reconnu comme efficace.
Les États-Unis eux-mêmes y recoururent, construisant des canons antiaériens Bofors d’origine suédoise. En Suède, la production était très lente et cela ne pouvait convenir aux besoins de l’US Army. Je salue ces deux possibilités, pour le coup historique et utiles au joueur. Enfin, l’Axe peut désormais installer ses propres satellites et exercer un contrôle plus ou moins rapproché sur leur économie, leurs technologies etc. Ce fut notamment le cas en Slovaquie, État fantoche dirigé par Jozef Tiso, mais où le pouvoir était en réalité aux mains des Allemands.
Ces ajouts sont donc intéressants, mais je pense que les développeurs devraient se pencher sur l’équilibrage plus général du jeu avant tout, même si les patchs le font peu à peu. En effet, après plus de 70 heures de jeu et un suivi pointilleux depuis sa sortie, je trouve que le titre favorise encore trop l’Axe. L’URSS et la Chine tiennent assez rarement le choc aux cours de mes parties et trop de pays neutres rejoignent l’alliance allemande, notamment la Turquie et l’Espagne nationaliste.
De plus, les pertes au combat, que j’évoquais dans le test de Together for Victory restent parfois hallucinantes. Il m’arrive de perdre des centaines de milliers d’hommes en quelques semaines, ce qui n’est pas très réaliste, même pour la Seconde Guerre mondiale, surtout que le jeu ne prend pas vraiment en compte les civils. Cela n’est peut-être pas le cas chez tout le monde toutefois, et je précise bien que c’est une impression personnelle.
J’en profite pour mentionner également la sortie d’un DLC gratuit pour la première bougie du jeu, et disponible pour tous. Sobrement intitulé Anniversary pack il propose notamment de nouveaux portraits d’officiers et symboles de divisions ainsi que des voix en polonais pour les unités de ce pays. C’est peu et anecdotique, mais c’est toujours ça de pris et on ne s’en plaindra pas !





















