Les fusils se dressent vers le ciel, les sabots des cosaques résonnent sur les Champs-Élysées, Napoléon porte l’aigle au cœur de l’Europe, l’Union Jack flotte crânement au mât des bâtiments de la Royal Navy… Pas de doute, March of the Eagles est arrivé sur nos ordinateurs et va permettre aux passionnés de revivre les guerres napoléoniennes.

Aspects techniques

D’un point de vue purement technique, la nouvelle production du suédois Paradox utilise un moteur graphique bien connu des habitués : c’est le Clausewitz engine, apparu il y a quelques années avec Europa Universalis III et bonifié depuis. Sans remettre sur le tapis le débat entre 2D et 3D dans le milieu du wargame, on dira que ce moteur a fait ses preuves depuis sa sortie. Il permet un confort de jeu certain, notamment grâce à une lisibilité correcte et un zoom / dézoom assez poussé et toujours utile. La carte et les menus sont plutôt jolis et clairs, les sprites d’unités changent selon les pays. Quant aux  raccourcis et filtres, ils sont toujours présents et  permettent de s’orienter efficacement dans le jeu.

Les musiques mettent bien dans l’ambiance, comme toujours avec Paradox. Hélas elles sont peu nombreuses : seulement 40 minutes ! Je n’ai pas non plus déterminé si elles étaient à nouveau l’œuvre d’Andreas Waldetoft, compositeur attitré du studio. A l’heure où j’écris, il n’en fait toutefois pas mention sur son site officiel. Enfin, les bruitages restent discrets et peu nombreux. L’intérêt d’un tel jeu n’est évidemment pas là, mais on ne peut que saluer les efforts faits par le studio depuis sa création pour rendre ses productions agréables à l’œil et à l’oreille. A noter que le jeu est, à l’heure actuelle, en Anglais ou en Allemand uniquement.

Délimitation et buts

S’il faut définir March of the Eagles par rapport à ses frères et sœurs chez Paradox, je dirai qu’il se rapproche plus d’un Sengoku voire d’un Hearts of Iron que d’un Europa Universalis. C’est-à-dire que l’essentiel du jeu est tourné vers la conduite de la guerre, le tout dans une durée de jeu limitée (1805-1820). Les jours s’écoulent donc heure par heure et l’alternance jour / nuit a une importance, notamment dans les combats. Ainsi, pas de gestion fine de l’administration, de la religion, des constructions, de la diplomatie, de l’espionnage, etc. Le budget n’est pas non plus finement paramétrable comme dans les Victoria et l’argent sert peu ou prou à recruter ses troupes ou à améliorer ses provinces, point final. D’ailleurs les bâtiments à construire se comptent sur les doigts de la main : on peut créer des dépôts pour améliorer le ravitaillement, augmenter les fortifications, développer les routes ou le niveau général de la province (notamment pour améliorer ses revenus) et la chose s’arrête à peu près là.

Par contre les provinces sont regroupées par régions, rattachées à une ville importante qui possède une forteresse. Celles-ci apparaissent visuellement sur la carte. Si les provinces lambda tombent automatiquement en votre possession quand vous les envahissez… Il faut obligatoirement faire tomber les autres en les assiégeant pour s’en emparer (à noter que les assauts sont coûteux, comme toujours). La gestion du territoire est donc propre au jeu, et durant les résolutions de paix, ce sont lesdites régions qui changent de main et pas des provinces isolées.

Ceci nous amène à la diplomatie : elle est minimale. Deux camps principaux s’affrontent : la France et ses alliés d’un côté, et de l’autre les coalisés. Ces derniers sont réunis aux côtés du Royaume-Uni qui les attire contre Napoléon avec son or. Outre le recrutement et la construction, il sert en effet à financer les guerres de ses alliés et la Grande-Bretagne devra en posséder de manière importante pour garder les coalitions vivantes et nombreuses.

S’il est possible de faire des guerres en dehors de cet affrontement de titans (j’ai par exemple combattu et vaincu l’Empire Ottoman seul, avec l’Autriche), la durée limitée du jeu et sa période même font qu’il est plus intéressant d’entrer en guerre avec ou contre le camp français pour espérer dominer l’Europe en fin de partie. En effet, outre le prestige (apparu dans Victoria premier du nom) qui intervient dans le décompte final (il s’engrange par vos victoires militaires et diplomatiques et se perd avec vos défaites), le paramètre le plus important à prendre en compte est la domination. Celle-ci est navale et / ou terrestre, et symbolisée par la possession de provinces-clé (des ports ou des villes importants) : à vous d’en avoir le plus possible pour l’emporter. Il est évidemment grisant d’essayer de devenir, par exemple, l’élément naval dominant avec la France et de réussir le rêve de Napoléon : un débarquement en Angleterre…

Enfin, la technologie est réduite à sa plus simple expression, sous la forme d’idées débloquées par l’intermédiaire de points gagnés tous les mois, et par évènement (d’ailleurs peu nombreux). Ils permettent tout de même de se spécialiser : en combat naval, en artillerie, en choc ou en tir par exemple. De plus, chaque pays a une branche d’idées qui lui est propre. Le tout reflète bien de l’époque, avec des idées comme « marcher au son du canon » (les troupes voisines rejoignent automatiquement un combat enclenché contre des unités amies).

March of the Eagles
Tableau des idées.
March of the Eagles
Je suis invité à la coalition.
March of the Eagles
Les deux camps en 1808.
March of the Eagles
Vision générale de la guerre en cours.

« Soldats, je suis content de vous »

Je l’ai dit, l’élément militaire est le cœur du jeu. A vous d’organiser vos armées, et de porter le fer et le feu chez l’ennemi. Pour cela le joueur dispose d’un nombre important d’unités, ayant toutes leurs caractéristiques. De ce point de vue, les amateurs sont gâtés : il est possible de choisir entre artillerie à pied, à cheval ou côtière, entre infanterie de ligne, légère, de la garde… Les dragons, cuirassiers, chevau-légers ou hussards sont aussi de la partie, comme les unités uniques à chaque pays, zone (les tirailleurs Corses pour la France par exemple). Sans oublier les unités navales : le distingo est même fait entre les différents rangs des navires de ligne !

Les unités de ravitaillement apparaissent également et il va être important de protéger ses lignes d’approvisionnement des raids de l’ennemi, sous peine de voir ses armées manquer de vivre et mourir à petit feu…  Enfin on notera la possibilité de recruter de la milice et des unités de garnison. Immobiles, elles vont être efficaces pour protéger les provinces clés des régions dont je parlais précédemment. Évidemment, il faudra faire attention à surveiller votre jauge de recrutement, car certains pays ont des ressources en hommes (et en argent !) limitées, et il faut également veiller à remplacer les tués dans vos régiments (l’unité de base du jeu).

Pour ce qui est du combat, le jeu découpe vos armées. Celles-ci ont donc un centre, un flanc droit et un flanc gauche, plus les réserves. Chaque partie a à sa tête un commandant. Il faut donc veiller à faire des piles équilibrées car en combat, les tronçons ont des actions distinctes. Il peut donc être dangereux d’avoir une aile droite sans cavalerie : les troupes montées ennemies pourraient l’enfoncer… Il est certain qu’un minimum de connaissance des unités de l’époque vous sera utile, d’autant plus que, je l’ai dit, elles sont en majorité représentées dans le jeu.

Comme dans les autres productions Paradox, il faut aussi prendre en compte les commandants, qui gagnent des traits de caractère au fur et à mesure des batailles et ne sont donc pas tous bons aux mêmes types d’engagements. Mais aussi le terrain, la saison, l’heure, la supériorité numérique et des idées (= technologies) dans les combats. On ne s’élance pas avec de la milice, même nombreuse, contre une région bien armée et commandée !

Malgré cela, quelques syndromes sont toujours présents. Comme le fait agaçant qu’il faille poursuivre, dans un cache-cache horripilant, les survivants des batailles. Cela fait perdre du temps et peut durer un bon moment. Heureusement, des idées comme « marcher au canon » vont vous aider.

Les limites

Si le jeu se veut par essence centré sur une période précise, et donc forcément moins complet qu’un autre, je ne peux m’empêcher de penser qu’il manque un tantinet d’ambition. Je m’explique. Commençons par les dates : 1805-1820. Même jour par jour, c’est court, surtout à haute vitesse de jeu (qui est fluide). Bien sûr, cela permet des parties rapides, ce qui est positif. Mais on aurait aussi aimé qu’il permettre de revivre certaines campagnes du début de l’épopée napoléonienne : la campagne d’Italie de 1796 ou celle d’Égypte en 1798-1799.

De plus, le fait que la grande campagne soit le seul scénario ne permet pas de se placer, par exemple, à l’entrée de la campagne de Russie ou d’essayer d’empêcher l’invasion de la France par les coalisés en 1814. D’autant plus que, l’IA restant ce qu’elle est, il est dur de recréer en jeu les situations historiques. N’espérez pas forcément voir de Russes à Austerlitz ! Jouant avec l’Autriche, je n’ai pas été ennuyé par la France et l’Angleterre ne m’a contacté pour sa coalition que quelques années après le début du jeu… Cet unique scénario est donc dommageable.

Enfin, il est également frustrant de voir la carte limitée à l’Europe et au bassin Méditerranéen (grosso modo). Les guerres napoléoniennes se sont aussi déroulées dans les espaces coloniaux des européens, avec l’utilisation de corsaires sur toutes les mers, etc. De plus, les États-Unis se sont lancés dans une guerre contre les Britanniques en 1812. Ce conflit, très peu représenté en matière vidéoludique, aurait gagné à être présent dans le jeu avec au moins la présence de l’Amérique du Nord. On imagine aussi aisément un joueur prenant les USA et intervenant en Europe pour l’un ou l’autre camp…

Pour conclure

Malgré tout, March of the Eagles est un bon jeu, qui permet de revivre les campagnes napoléoniennes bien plus finement qu’un Europa Universalis. Les unités sont variées, la lutte pour la domination âpre et la possibilité de changer le cours de l’Histoire grisante. Le tout pour 20 euros. Je regrette juste qu’il soit limité sur les points que j’ai cité.

  • Parties rapides et intenses
  • Une période intéressante et qui méritait une production Paradox
  • Unités nombreuses
  • Unique scénario
  • Jeu restreint en termes géographiques
  • Parties trop rapides ?
Infos pratiques

Sortie : 18 février 2013

Studio / éditeur : Paradox Interactive

Site officiel : fiche chez Paradox. Une démo est disponible (sur Steam).

Jeu en téléchargement (Steam, Gamersgate…)

10 Commentaires

  1. Je suppose que les commandants sont historiques….Donc on peut faire gagner des qualités à Ney (ce n’est qu’un exemple )

    • Oui, une bonne partie l’est, avec de vrais portraits pour les symboliser. Ils ont des caractéristiques de base, et peuvent gagner des traits durant les combats, point apparu avec Hearts of iron II: doomsday.

  2. Dommage que les leaders ne puissent être tués ou blessés. Autre invraisemblance, on peut transférer un leader d’une armée à l’autre sans délai.

    • Oui, c’est un problème récurrent du studio… Je me souviens avoir transféré des généraux d’un bout à l’autre de la carte dans Hearts of iron II… Mais là les leaders pouvaient être tués!

  3. Bonjour,

    Merci pour ce test qui va à l’essentiel mais je le trouve un peu short!
    Apparemment le jeu fait la part belle à la guerre mais qu’en est-il des combats. Vous indiquez que l’armée est séparé en trois (2 flancs, un centre) mais comment agit-on sur les troupes. Une photo d’écran d’un combat serait la bien venue

    • Bonjour,

      Et bien la réponse est très simple: le joueur n’a aucune prise sur les combats et n’agit donc pas sur les troupes! Croyez bien que je l’aurais précisé si cela avait été le cas. Cela reste un jeu paradox où l’on envoie une pile d’unité contre une autre (grosso modo)…

  4. “On imagine aussi aisément un joueur prenant les USA et intervenant en Europe pour l’un ou l’autre camp…” … heu… non…c est pas possible historiquement., louisXVI a aide les usa pour leur independance et a ruine la tresorie de la france (3.4 millard de livre tournois depensee et les usa a trahi la france en faisant un traite de paix separee avec la grande bretagne contraire au traite d alliance avec la france , en plus de ca les usa ont conserve le droit de monopole commerciale aux anglais , la france n a rien gagner dans cette guerre d indépendance des usa , a part avoir le prestige d aider une nouvelle nation, donc on connais la suite pour louis XVI qui a lever plus de taxe pour combler le deficite et sa tete est tombee lors de la revolution francais ,13 ans apres la revolution americaine , alors qui a dit que le chiffre 13 portait bonheur ?). Ensuite la france a vendu les colonies aux usa car napoleon avait besoin d argent pour financer la guerre en europe. Donc les usa declarer la guerre a la france c est quasiment impossible.

    • Je ne me posais pas en termes historiques, où;, en effet, c’est impossible, mais en termes de jeu seulement.

  5. en tout cas je suis d accord avec toi sur le fait de limiter dans le temps la periode de guerre et etre obliger de choisir un des deux camps , on peut meme pas choisir de former une troisieme alliance avec l empire ottoman et botter le cul aux deux autres alliances , c est vraiment frustrant et c est dommage, je vois bien former une alliance de petits pays qui botte le cul aux grandes alliance , c est quasiment impossible a realiser mais le challenger est la.

  6. bonsoir,
    bon le jeu est simplement inutile car, comme c’est tjs le cas, l’IA est LAMENTABLE.
    de plus, en tant que France, JAMAIS l’angleterre ne cherchera a debarquer qqpart ce qui rend ce jue INUTILE SAUF en multi
    autant dire que ….. autant jouer a crown of glory gold en multi, c’est mieux
    bref, une ENORME deception et on se demande comment un commentateur peut aimer ce jeu qui n’est meme aps un wargame
    bonne continuation

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