Le prolifique Panzer Corps nous revient à nouveau en cette fin d’année 2015 avec une extension de taille sobrement intitulée Operation Sea Lion. Ce nom fait référence à un projet d’invasion jamais réalisé du troisième Reich au début de la Seconde Guerre mondiale.

Le contexte historique

Il ne s’agissait ni plus ni moins que d’un vaste débarquement au Royaume-Uni, dans le sillage de la chute de la France à l’été 1940. Sur le papier, la chose semblait possible. L’état moral des Alliés était plutôt mauvais, la France était hors-jeu et une grande partie du matériel britannique avait été abandonné à Dunkerque… Toutefois la Grande-Bretagne restait un ensemble d’îles défendues par une Royal Air Force encore combattive et l’invaincue Royal Navy, l’une des plus puissantes marines du monde avec laquelle celle d’Allemagne, la Kriegsmarine, ne pouvait rivaliser.

La suite est connue : ces données ainsi que l’orientation progressive de Sea Lion (Seelöwe en allemand) vers un affrontement aérien connu sous le nom célèbre de « Bataille d’Angleterre » firent avorter l’opération. La Luftwaffe se révéla incapable, malgré de beaux succès, d’emporter la décision à elle seule. Tournée vers l’assaut de l’URSS à partir de l’été 1941, ayant perdu un grand navire de surface peu avant, le Bismarck, l’Allemagne ne tenta finalement jamais cette invasion amphibie risquée et qui s’ajoute à une longue liste de projets d’invasion ratés des îles britanniques. Historiquement, une grande partie de l’opération resta donc une liste de projets grandioses sur le papier, mais sans suite vraiment concrète. A ce sujet, Churchill déclare abruptement dans ses Mémoires (à prendre avec précautions bien sûr) :

« En suivant l’évolution des préparatifs d’invasion allemands […] nous avons constaté que l’assurance triomphale du début se mua progressivement en incertitude, pour aboutir finalement à un manque total de confiance dans l’entreprise. » (t.1, ed Texto, p. 572-573).

L’uchronie pour Panzer Corps

Voilà les faits, et c’est là que le jeu vidéo intervient. Ainsi, Operation Sea Lion se présente sous la forme d’une uchronie qui vient rajouter une campagne de 30 scénarios à Panzer Corps dont nous avons déjà bien parlé dans nos colonnes. Là, « Sea Lion » est lancée et, côté allemand, c’est à vous de la réussir.

Dès le début, deux constats s’imposent : l’extension est à mon sens réservée aux vétérans du jeu et à ceux qui apprécient l’histoire alternative. Si ce n’est pas le cas, vous allez perdre votre temps. Pour les autres, vous pouvez vous y engouffrer, ce n’est pas la première fois que le jeu oscille vers ce type de réalisations : on se souvient qu’il était possible d’emporter la guerre d’Afrique dans le DLC Afrika Korps (voir notre test), et d’aller jusqu’en Inde.

Pourtant, là c’est toute l’extension qui est fictive. Partant de cela, force est de constater que la qualité d’écriture reste au rendez-vous ainsi que le sérieux habituel du studio. Pour moins de dix euros en téléchargement, vous aurez donc droit à 30 scénarios comme je l’ai dit, qui débutent dans les îles de la Manche et ne s’achèvent qu’avec la prise de l’Islande, en passant par Londres et l’Écosse ! Alléchant programme.

Pour ce faire, ceux qui possèdent le contenu additionnel Grand Campaign ’40 peuvent d’ailleurs débuter Sea Lion avec les unités qui y auraient survécu, belle initiative de continuité. Pour le reste le défi à relever, change de l’ordinaire, avec des missions variées, des troupes qui peuvent changer de camp, des zones à reconstruire pour qu’elles servent à votre armée etc. On appréciera aussi la possibilité de choisir entre plusieurs embranchements, donc scénarios, en cours de campagne, suivant les préférences du joueur.

A titre personnel, ayant bien parcouru les autres campagnes du jeu, je trouve par contre la difficulté pas toujours bien dosée et plus d’une fois j’ai pesté contre les hordes apparemment ininterrompues d’avions de la RAF et de navires britanniques déferlant sur mes maigres forces. Attendez-vous à des sueurs froides pour réduire au silence certaines zones bien défendues…

Pourtant, j’ai pu l’évoquer, historiquement l’armée britannique a mis des mois à se relever du désastre de la campagne de France et craignait par-dessus tout une invasion de son sol. Une grande partie du matériel était perdu ou dispersé dans les colonies et protectorats (Égypte, Inde…), la défense reposait en grande partie sur la flotte et l’aviation. Avec des forces terrestres en pleine restructuration et une milice peu équipée (la Home guard), on peut se poser la question de son hypothétique défense. C’est toute l’ambiguïté de l’uchronie, car il faut bien proposer un défi intéressant aux joueurs…

 

 

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L’invasion des iles anglo-normandes. Les garnisons britanniques sont maigres.
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Les péniches de débarquement déferlent sur les côtes britanniques. Les soldats sont des vétérans aguerris de la campagne de France.
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Le déploiement de puissantes forces aériennes doit me permettre de couler la flotte adverse et de neutraliser ses aérodromes.
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Liste des scénarios.

 

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Mais les vagues de navires et d’avions ennemies ne paraissent pas cesser au-dessus de la Manche… C’en devient agaçant.
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Les aérodromes ont été neutralisés au sud de Londres.
Notes
Multimédia
65 %
Interface
80 %
Gameplay
75 %
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test-de-panzer-corps-operation-sea-lion<b>Multimédia</b> : Rien de nouveau sous le soleil. Ce sont les graphismes et sons du jeu de base, avec la modélisation précise des îles britanniques bien sûr.</br> <b>Interface</b> : Toujours claire et précise, les objectifs sont affichés clairement en début de chaque tour. On aurait aimé quelques nouveautés depuis le temps que le jeu existe.</br> <b>Gameplay</b> : Il reste terriblement efficace et de nouvelles possibilités sont introduites avec cette extension.</br></br> Toujours est-il que le contenu de Operation Sea Lion est abordable, riche, assez difficile et promet de très longues heures de jeu aux passionnés. A vous de voir.

1 commentaire

  1. Assurément une campagne hypothétique dont la réalisation laisse rêveur ; si l’Allemagne avait vraiment su saisir l’opportunité, l’histoire tout entière eut été tellement différente. En dépit d’une certaine lassitude, difficile de ne pas être tenté par cette extension ! L’une des motivations premières de tout wargamer, refaire l’histoire, trouve ici toute sa raison d’être.

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