L’opération Torch est le premier scénario de la campagne dédiée aux forces américaines et au général Patton dans le récent et intéressant Total Tank Generals. Les deux autres campagnes étant consacrées à Rommel et Zhukov. Voyons aujourd’hui ce que donne ce joli wargame qui mêle très habilement complexité tactique et gameplay facile d’accès. Un jeu qui se veut relativement simple, pour un wargame, mais pas simpliste pour autant.
La carte est petite, elle fait à peu près 12 x 10 hexagones, mais l’action qui va s’y dérouler est très dense. D’autant plus si l’on veut, ce qui est optionnel, essayer de maximiser ses points de victoire, le Prestige, pour obtenir plus d’avantages dans les scénarios suivants d’une campagne.
Notons ici que hormis le nom et la situation historique générale, le joueur ne sait quasi rien de ce qui va l’attendre dans les scénarios. L’adversaire aura-t-il beaucoup de blindés, d’artillerie, d’aviation, etc. ? Et donc, faut-il privilégier pour son armée les canons antichars en appui, la défense antiaérienne, les véhicules pour percer rapidement, l’infanterie pour défendre et / ou occuper des positions, etc. il y a très peu d’éléments, comme dans beaucoup de jeux d’ailleurs, permettant au joueur de prendre une décision autrement qu’à l’aveuglette.
On peut voir cet aspect précis du jeu comme une sorte de défaut, soit comme un choix de gameplay, c’est une question de préférence, d’interprétation, de goûts. Toutefois, si l’on accepte la formule du gameplay proposée, celle-ci fonctionne très bien, le jeu est très ludique.
Quant au choix d’unités que l’on fera au début d’un scénario, à l’évidence, en étant ainsi dans le brouillard, on va privilégier une répartition équilibrée des potentiels d’action, donc prendre un peu de tout. Au cas où… Et au fur et à mesure que l’on avancera dans un scénario, le fait de pouvoir acheter et amener quasi au coeur des combats n’importe quel type de renforts permet de s’adapter au cours de la situation.
Prenons un exemple concret, vous débutez une partie, et soudain à son tour de jeu l’IA dévoile plusieurs unités de blindés. Plus que vous ne pensiez. Ceux-ci vont sérieusement mettre en difficulté votre infanterie, évidemment, donc votre progression. Votre capital initial de Points de Prestige peut vous permettre dans une relative mesure de compenser au début de votre prochain tour, en achetant une unité de canons antichars qui pourra être déployée plus ou moins près des combats (selon la carte et la situation) et qui pourra agir immédiatement.
Alternativement vous pouvez aussi par exemple compenser en achetant plus de blindés. Ou toute autre unités susceptibles d’avoir un effet direct ou indirect utile. Typiquement les mortiers, qui font peu de dégâts mais affaiblissent le moral d’une unité visée, ce qui peut permettre de la faire battre en retraite. Ou l’artillerie lourde, qui fait plus de dégâts, est couteuse bien sûr, et entame également le moral des cibles.
Le moral des unités est un facteur majeur à très bien jauger pour pouvoir réaliser des manoeuvres efficaces afin de décrocher la victoire. J’en reparlerais, car il se combine avec d’autres facteurs à ne pas non plus négliger (i.e le ravitaillement en munitions).






Rajoutons à cet aspect du choix de la composition de votre armée deux autres points importants.
Primo les unités gagnent de l’expérience au combat, ce qui leur permet d’obtenir des compétences spéciales. Celles-ci sont nombreuses et variables. Par exemple une unité d’infanterie peut ne pas être gênée par le franchissement d’une rivière. Ces compétences spéciales peuvent avoir beaucoup d’importance dans des cas précis au fil de la campagne (dans le premier scénario les unités commencent au niveau, avec peu ou pas de compétence spéciale).
Deuxio, passé le premier scénario, il y a aussi une phase de déploiement libre permettant de mieux positionner ses troupes. Cela peut faire une différence pour les premiers mouvements et donc aller occuper rapidement des positions du terrain plus avantageuse (ex : ne pas avoir trop d’unités à découvert en terrain clair, ne pas empiler trop d’unités ensemble si l’adversaire a de l’artillerie, etc.).
Les premiers mouvements dans un scénario peuvent s’avérer, même si l’ennemi n’a pas encore bougé, plus importants qu’il ne semble. En effet, fonction des points d’action, vos unités peuvent se retrancher (bonus défensif en cas d’attaque) et pour beaucoup se mettre en posture d’observation / tir de réaction. Selon la configuration de la carte, on pourra ainsi créer des zones où surprendre l’ennemi quand il avance. L’IA étant plutôt audacieuse dans ses mouvements, voire même il m’a semblé assez imprudente par moment, une bonne position défensive peut vous permettre de réussir de belles contre-attaques au tour suivant.
Attention, l’IA utilise aussi les positions défensives à son avantage, d’où l’intérêt d’avoir au moins une unité de reconnaissance. Ou des avions de reconnaissance aussi, si vous avez les points d’aviation nécessaire. Mieux vaut-il bombarder maintenant une unité visible, ou observer les lignes adverses pour bombarder plus finement au tour suivant ? A vous de bien peser les pour et les contre.
Comme vous le devinez, le début d’un scénario dans Total Tank Generals offre déjà une belle palette de choix. Ceux-ci permettront de minimiser l’effet du hasard, tant du fait qu’on ne sache pas ce qu’il y a en face, que aussi des jets de dés (il y en aura beaucoup) que l’on peut par malchance rater à un moment crucial.
Par exemple, si votre artillerie rate sa cible, le moral adverse n’en sera que meilleur, vos attaques et ou assauts (un type d’attaque spéciale) n’en seront que plus difficiles. Il y a de nombreux cas de figure de ce genre. Rien de très compliqué à évaluer dès lors que l’on a saisi la logique du gameplay (l’interface du jeu est en ce sens très réussie pour aider le joueur à bien lire la situation). Mais il faut être attentif, et donc aussi en amont prendre la bonne décision au bon moment.

Bilan final. J’ai gagné au combat 1362 points de prestige (on en gagne de petites somme quand on force une unité démoralisée à la reddition, par exemple en cas d’encerclement). J’ai perdues deux unités. En fait beaucoup ont été sérieusement blessées, mais je les ai fait se replier pour préserver les points d’expérience, donc les compétences spéciales acquises. Cela servira très probablement dans les prochains scénarios. J’ai éliminé 10 unités allemandes (beaucoup d’infanterie légère et de blindés légers). La partie s’est arrêtée automatiquement lors de la prise de l’objectif final, j’aurai probablement pu encore éliminer 2-3 unités ennemies en déroute, mais je crois que cela ne change pas grand chose (pour la suite). J’ai gagné 1550 points d’expérience (XP), ce qui concrètement signifie qu’environ la moitié de mes troupes sont passées au niveau 2.
Le niveau de victoire, le nombre d’étoiles, permet de débloquer pour les scénarios suivants différentes unités supplémentaires. Ici j’aurais en option pour la suite des chars légers avancés M5A1 Stuart. Dans cette première bataille, les blindés légers ont été très utiles pour rapidement manoeuvrer. A eux seuls ils ne suffisent pas, il faut par exemple de l’aviation ou des blindés moyens en appui, mais leur rapidité permet coupler avec l’artillerie des assauts très rapides et souvent efficaces. Si en plus on parvient à amener avec de l’infanterie…
Comme vous le voyez avec ce scénario, pour un jeu qui ne prétend pas être une simulation précise (comparé à d’autres wargames plus pointus), Total Tank Generals offre un très bon rapport en termes de complexité / facilité de prise en main / durée de jeu / fun du gameplay. Le tout avec des graphismes très soignés. On ne peut pas juger un jeu sur un seul scénario, c’est certain, mais indéniablement ce wargame a des qualités tant pour des joueurs aguerris que pour des débutants. Ce qui est d’ailleurs l’un de buts des développeurs, faire découvrir assez facilement et ludiquement 39-45.
L’IA peut surprendre, lors d’un autre essai, elle a lancé une attaque très suicidaire, qui lui a causé de nombreuses pertes, mais qui lui a permis d’amener une infanterie sur ma position de départ pas assez défendue. Résultat, alors que j’enfonçais les lignes de l’Axe au centre / au sud, avec un mouvement certes kamikaze, elle m’a infligée une défaite très inattendue (la logique aurait voulu qu’elle défende mieux vu que j’enchainais les prises d’objectifs). Elle a en un sens bien jouée et a dans ce cas précis emportée une victoire disons à la Pyrrhus. Incidemment, on voit là une partie de la logique du jeu (au moins pour ce scénario), contre-attaquer / assaillir fortement le joueur et profiter presque de la moindre faille défensive. Quitte à subir de très lourdes pertes…
Exemple d’assaut
Un assaut est une attaque spéciale qui utilise tous les points d’action d’une unité et double sa consommation en points de munitions. Si l’assaut est réussi, le défenseur battra en retraite (si il n’est pas éliminé / capturé). On peut monter un assaut depuis un hexagones avec un maximum de trois unités. Préalablement, mieux vaut bombarder pour diminuer le niveau des fortifications (si il y en a) et le moral des défenseurs. Les assauts sont indispensables pour percer. Selon les points d’action d’une unité, on peut faire une à deux attaques normales par tour. On peut enchaîner une attaque normale depuis un hexagone pour affaiblir les défenseurs, puis un assaut léger ou lourd depuis un autre hexagone. Les possibilités tactiques sont assez nombreuses.
Ce premier assaut réussi, je gagne un net avantage. D’une part j’empoche 300 points de Prestige, d’autre part l’objectif conquis se transforme en une zone de déploiement (celle-ci ne pourra toutefois servir que quand elle ne sera plus dans une zone de contrôle ennemie). A ce moment, j’ai encore fait peu de mouvements et je dois prendre garde à la contre-attaque à venir de l’IA. Je vais opter pour une avance prudente, donc pour plusieurs positions défensives afin de laisser venir l’IA plutôt à découvert.
J’avais un capital initial de 500 Points de Prestige, utilisable donc à n’importe quel moment de mon tour de jeu. Ayant maintenant 800 PP, grâce à l’objectif stratégique conquis, je vais acheter de l’artillerie lourde et une seconde unité de canons antichars. avouons que je triche un peu, d’une certaine manière, car ayant fait plusieurs essais sur ce scénario, je sais donc que coté Axe l’IA à plusieurs blindés légers et un blindé moyen.
Toutefois, si avoir deux unités antichars est certes utile, dans cet essai ce qui m’a le plus permis de l’emporter est d’avoir mieux placé mes unités en positions défensives, d’avoir plus utilisé donc des tirs de réaction (automatiquement pendant le tour de l’IA – défaut, on ne choisit pas sa cible), et d’avoir plus cherché à taper sur le moral adverse au lieu de chercher à faire des dégâts. Les deux sont liés, mais la perte de moral diminue les chances de succès des attaques ennemies et est susceptible de faire se replier les défenseurs lors des tours suivants. Donc d’ouvrir des brèches dans les lignes adverses…

Exemples de compétences spéciales des unités (Perks)
Chaque unité gagne de l’expérience au fil des combats, ce qui permet de choisir à chaque niveau d’expérience une compétence en bonus. Voici quelques captures d’écrans montrant différents exemples. Un blindé moyen comme un M3 avec la spécialisation « anti-infanterie » est par exemple très pratique pour déloger des fantassins. On conserve les unités au fil des scénarios d’une campagne.
Pour plus d’informations sur Total Tank Generals, voyez notre aperçu du scénario La bataille d’Arras, puis cette fiche sur Steam et cette page sur le site du studio. A noter qu’une démo est toujours disponible via Steam.
Sachez de plus que comme prévu dans la feuille de route, un premier patch v1.1 vient de blitzer la semaine dernière, ajoutant au jeu en bonus quatre nouveaux scénarios individuels (Battle of Courland Pocket, Battle of the Alps, Battle of Belgium, Operation Winter Storm).
Au sujet de l’opération Torch, voyez éventuellement cet article : La Big Red One entre en lice.






