“L’an 1348, la peste se répandit dans Florence, la plus belle de toutes les villes d’Italie. Quelques années auparavant, ce fléau s’était fait ressentir dans diverses contrées d’Orient, où il enleva une quantité prodigieuse de monde. Ses ravages s’étendirent jusque dans une partie de l’Occident, d’où nos iniquités, sans doute, l’attirèrent dans notre ville. Il y fit, en très-peu de jours, des progrès rapides, malgré la vigilance des magistrats, qui n’oublièrent rien pour mettre les habitants à l’abri de la contagion.” Ainsi écrit Boccace dans son fameux Decameron qui a pour toile de fond la peste de Florence de 1348… Le ton est donné, je vais vous parler de la dernière extension en date de Crusader Kings II, centrée sur les maladies et qui modélise la peste. Ce sera aussi l’occasion de passer en revue les principaux ajouts du patch qui l’accompagne.

Les maladies et épidémies

C’est la principale nouveauté : le jeu gère bien mieux le volet de la santé, publique comme des personnages, qu’avant. Par exemple, vos souverains et leur entourage ne seront plus seulement « malades » mais les symptômes seront décrits et, avec eux, leurs effets, qui diffèrent les uns des autres.

Il vous sera par exemple donné d’assister à la lente agonie d’un roi aimé, frappé d’un mal de tête puis de fièvres, et douleurs au ventre… Avant de le voir périr. Si l’on gagne en réalisme, j’ai quand même pu jouer quelques années assez macabres à ce sujet quand le sort s’est acharné sur plusieurs de mes personnages les uns à la suite des autres.

Pourtant, ce n’est pas là le principal : l’extension rajoute surtout un système d’épidémies qui lui est propre. Il est paramétrable en début de partie et l’on peut régler la fréquence et la virulence des futures afflictions. Une fois en jeu, celles-ci vont survenir sur la carte à intervalles plus ou moins réguliers.

Elles contaminent d’abord une province et, si celle-ci ne résiste pas à la maladie, elle va pouvoir s’étendre et causer des pertes dans le voisinage. On se retrouve par exemple avec la variole sévissant quelques années en Scandinavie, avec une Fièvre lente qui se propage dans le nord de la Turquie actuelle etc. Les provinces touchées, visibles grâce à un nouveau filtre de carte, voient ainsi leur population diminuer et accumulent les malus, comme des pertes économiques ou troupes moins nombreuses. Il est même courant que les personnages de votre cour ou vous-même ne soyez victimes de quelque microbe résistant.

Pire, à un certain moment, la peste va faire son apparition, suivant les modalités que vous aurez choisies (voir capture d’écran). On peut même retenir l’option historique, qui la voit survenir depuis l’Orient (le bord est de la carte en termes de jeu) en 1345 et se diffuser en quelques années dans presque toute l’Europe. Là, il faut s’attendre à de terribles ravages économiques et humains et, rappelons qu’elle tua entre un tiers et 50% de la population européenne de l’époque.

L’épidémie principale finie, laissant dans son sillage des provinces ravagées, et encore plus si l’on cumule avec d’éventuelles guerres… des « répliques » moins meurtrières ressurgiront de temps à autre, ce qui est parfaitement historique d’ailleurs. Notons là que la dernière peste en France eut lieu à Marseille sous le règne de Louis XV, en 1720 ! Soit très longtemps après la période couverte par le jeu, ce qui montre la persistance du phénomène et l’on comprend très bien le terme de « fléau » qui le caractérise souvent.

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La variole sévit en Turquie et dans le Caucase.
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Il est possible de se retirer du monde avec sa cour quand une épidémie menace.
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Je me suis lancé à la recherche d’un talentueux médecin.
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Et j’en ai trouvé un ! Il faudra le payer et il agira lors de maladies.

Le nouveau système peut s’avérer très punitif pour le joueur et on peut heureusement rendre les occurrences des épidémies assez faibles en début de partie comme je l’ai dit. Cela peut être  même une bonne idée pour  découvrir l’extension, car lutter contre de telles maladies est assez onéreux et pas toujours efficace, comme on va le voir maintenant.

Comment y réagir

Si historiquement la science médicale des années de la « peste noire », soit la fin du jeu, ne permit pas d’endiguer la progression de la maladie, et vit même les médecins être dépassés… le jeu permet plusieurs moyens de limiter les dégâts.

Sans parler de jouer des puissances qui furent à l’époque peu touchées voire presque épargnées par le fléau, le nord de l’Europe notamment. Ce qui n’y empêchera toutefois pas l’apparition d’autres épidémies comme la variole déjà citée !

On peut donc prendre la décision préventive de construire des hôpitaux : ils vont augmenter la résistance des provinces aux maladies, et peuvent être agrandis. On peut également leur faire bénéficier d’améliorations pour renforcer leurs effets.

Toutefois il faut bien admettre que les hôpitaux sont souvent très onéreux, et l’or est loin d’être abondant pour les petites et moyennes puissances du jeu. Là, toutes les options sont entre les mains du joueur : investir son argent dans la chose, cibler les provinces, ou encore espérer passer entre les mailles du filet.

Il est aussi possible d’engager un médecin officiel, nommé physicien. Moyennant une certaine somme, on recrute donc un personnage qui rejoint sa cour. Suivant la somme dépensée et son talent, il va aider à limiter les maladies via des évènements. On le voit aussi officier quand son souverain ou ses proches sont malades.

Il est ainsi possible de le laisser tester des remèdes expérimentaux, à ses risques et périls, de le féliciter lors d’un succès, ou de le châtier s’il ne fait pas bien son travail. La réussite de ses soins varie beaucoup d’un personnage à l’autre et il m’est arrivé de me retrouver avec un boucher coupable de la mort de mon roi !

Enfin, la cour peut prendre la décision grave de se cloîtrer, de se retirer de la vue des autres pour espérer échapper à une épidémie. Les contacts étant moindres, les risques d’infection également. Toutefois, ce faisant, le souverain se coupe de sa population ce qui génère des malus. Dans tous les cas il faudra agir au moins un minimum, sous peine de voir sa population disparaître en cas d’épidémie importante.

Les autres ajouts et ceux du patch

Notons à présent quelques nouveautés de The Reaper’s Due moins directement liées au « thème épidémique » de l’extension. Ainsi, les provinces épargnées par les maladies et  les guerres pendant longtemps deviennent prospères et gagnent des bonus, notamment financiers.

Le souverain peut aussi juger une province plus importante que les autres, via un marqueur représentant une couronne. Celle-ci distinguée, elle se développera mieux et plus vite que les autres. Les deux facteurs cumulés, la récolte devient intéressante.

L’idée vient sans doute de possibilités similaires dans des jeux comme Europa Universalis IV et même Victoria II du même studio, où il était par exemple possible d’encourager telle ou telle production dans une province par exemple. On note aussi de nouveaux surnoms pour les personnages, des traits de caractère supplémentaires et des interactions nouvelles avec les prisonniers et leur devenir. Au total, un lot important de possibilités de jeu en plus, qu’on ne dédaignera pas.

En outre, comme à son habitude, le développeur fait coïncider The Reaper’s Due avec un patch gratuit, le 2.6.1 (voir ce changelog). Encore une fois, les ajouts sont de taille et certains méritent d’être cités, comme la révision du gameplay des hordes introduites dans The Horde Lords, des rajouts pour les païens de The Old Gods, ou encore un nouvel écran lors des successions.

Le tout sans oublier les optimisations continues sur le front des sauvegardes, bugs, de la vitesse et fluidité du jeu. Ainsi, les développeurs n’oublient pas ce qui a déjà été fait dans le jeu et continuent de l’améliorer alors que les années s’accumulent sur sa tête.

Par contre, je suis toujours dubitatif sur cette tendance à brouiller les frontières entre extension (payante) et patch (gratuit). En effet, encore une fois certains éléments nécessaires à l’un se retrouvent dans l’autre : des suppléments sur les épidémies sont « livrés » avec le patch, et pas l’extension. Or, sans elle, ils sont assez inutiles ! Certes, le contenu principal est d’une dizaine d’euros cette fois, contre quinze à plusieurs reprises.

Enfin, aux côtés du patch 2.6.1 et de l’extension majeure, on trouve The Reaper’s Due Content Pack. Pour la somme de 4.99 euros sur le site de Paradox interactive, il n’offre que des portraits et autres ajouts cosmétiques assez dispensables. On notera qu’il se vend avec l’extension dans un pack et ce pour un prix de 13.99, ce qui est toujours appréciable.

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Un nouveau raccourci pour connaître le nombre d’épidémies.
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Le nouvel écran de succession, plus complet.
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Le Danemark est touché de plein fouet par une épidémie. Or, aucun hôpital n’y est construit.
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De tels évènements vous inciteront à sortir de votre réclusion.
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Lorsque la cour se cache, les conseillers ne peuvent logiquement plus remplir leurs missions.
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La nouvelle de la grande peste rejoint l’Europe.
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Il est temps de construire des hôpitaux.
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Améliorer un hôpital est hors de prix.
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Lorsque le roi sort de sa réserve, le pays lui en veut un certain temps.
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Les maladies sont à présent détaillées.
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Quelques détails sur les maladies. La guerre et la misère les favorisent.
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Et celle-ci apparaît à l’Orient.
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La peste a gagné le Proche-Orient et le Machrek.
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Les premiers effets de la peste.
Notes
Multimédia
65 %
Interface
80 %
Gameplay
85 %
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test-crusader-kings-ii-the-reapers-due-gare-a-faucheuseMultimédia : de nouveaux portraits et options graphiques liées aux maladies, mais en partie via un pack supplémentaire à 4 euros, d’où ma note. En dehors de ce DLC cosmétique le jeu reste très lisible et plaisant à regarder, quoique déjà ancien.<br /> Interface : toujours aussi lisible et fluide, elle remplit parfaitement son travail. Le patch 2.6.1 continue le travail d’optimisation.<br /> Gameplay : de bien bonnes nouveautés, une extension qui offre un plaisir de jeu renouvelé, quoique bien macabre.<br /><br /> En conclusion. Au final, le contenu est conséquent et va occasionner quelques sueurs froides : cela n’a rien de très réjouissant de voir la peste s’approcher de ses terres ! Le ton de l’extension est clairement sombre, si vous me permettez l’oxymore. Or, construire des hôpitaux, engager des médecins et répondre aux sollicitations lors des évènements coûte cher. En outre, avec le cumul des extensions et des possibilités qu’elles offrent à chaque fois, souvent contre argent, il faudra compter chaque pièce dépensée. Toujours est-il que, peu à peu, tous les aspects importants du Moyen-Age viennent à être couvert par ce jeu dont la profondeur ne lasse pas d’étonner, même s’il faut remettre à chaque fois la main au porte-monnaie.